"Paysage 6", 2012-2013 Courtesy Galerie RX
Du 15 Avril au 14 Juin 2015
La question de la place de chacun dans la société est au coeur du travail de Denis Darzacq.
Ainsi, après plusieurs séries où il confrontait des corps en action face à des environnements urbains et publics. Nu, La Chute, Hyper,"Paysa
Denis Darzacq développe son propos en se rapprochant de personnes en situation de handicap (Act, 2009-2011). Des corps prennent position dans un cadre donné, au sens propre comme au sens figuré. Il y est question de présence, d’équilibre, d’assurance, d’opposition, de défi et de révolte.
Le projet Comme un seul homme (2013) s’inscrit dans une autre forme que celle de l’instant photographique. Ici, des jeunes gens se situent face à un environnement chargé d’histoire, mais aussi par rapport à une mémoire, à un récit sorti de l’oubli. Nous voilà face à un film, et de fait, tous les questionnements sous-jacents apparus dans les travaux photographi- ques précédents de Denis Darzacq se posent avec encore plus d’ampleur, plus de nuance et de gravité.
"Portrait d'arbre 1", 2012-2013 Courtesy Galerie RX
ACT (2009-2011)
« Act est le fruit d’un long travail que Denis Darzacq a mené au contact de personnes en situation d’handicap. Si certains sont des acteurs, des sportifs ou des danseurs, tous ont trouvé dans nl’action et dans l’appropriation personnelle de l’espace commun le moyen d’affirmer la complexité de leur individualité au-delà de leur statut assigné et réducteur d’handicapés.
Denis Darzacq n’ignore pas la différence créée par le handicap. Mais elle cède la place à l’affirmation d’un univers mental particulièrement sensible dans les mises en scène où la direction d’acteur est appuyée par la spontanéité, voire l’excentricité, des modèles qui construi- sent avec leur environnement des situations fortement empreintes d’onirisme.
"Adrien Kempa, environs de Brest' 2010 Courtesy Galerie RX
"Paysage 7", 2012-2013 Courtesy Galerie RX
Denis Darzacq développe un travail personnel depuis le milieu des années 1990. De la photo- graphie de presse, qui fut, comme pour d’autres ,photographes français de sa génération, le berceau de sa pratique artistique, il conserve avant tout un regard aiguisé sur la société contem- poraine et une méthode. L’artiste sait, en effet, prendre le temps d’un long travail de terrain au contact direct de son sujet.
Mais il a rompu avec le reportage et sa valeur de témoignage pour adopter une démarche plus analytique donnant lieu à des séries formellement très cohérentes. Si les gros plans de la série Only Heaven révèlent encore l’implication personnelle de son auteur, les vues plongeantes d’Ensembles et frontales de Bobigny centre ville, puis des Casques de Thouars, traduisent, en effet, une mise à distance du sujet, voire un artiste en position de retrait.
"Maloyn Chatelain, musée des Beaux-Arts de Brest",2010 Courtesy MEP
"Jack Riley, Bradford, West Yorkshire", 2011 Courtesy MEP
Surtout, Denis Darzacq a acquis la conviction qu’une image construite pouvait paradoxalement servir son analyse de la société avec plus d’efficacité. Aussi recourt-il, depuis 2003, à des mises en scènes qui reposent toutes sur le principe de la disruption. Par leur état ou leur pose, les corps mis en scène bouleversent l’ordre établi, mais sans jamais faire basculer l’image dans le specta- culaire.
Des hommes et des femmes marchent nus dans des zones pavillonnaires ; d’autres semblent figés en apesanteur dans l’espace urbain ou entre des rayons de supermarchés ; des personnes en situation de handicap reprennent avec force possession de l’espace public. Le montage numérique, que l’artiste n’avait jusqu’alors jamais utilisé, lui a permis, dans la récente série Recomposition I, de pousser plus à fond cette logique perturbatrice.
"Kevin Rouxel, portrait extrait du film Comme un seul homme" de Denis Darzacq
"Jack Riley, Susan Midleton, Euan Evan-Thirwell, Brian Wakeling et Howard", 2011 Courtesy Galerie RX
"Portrait d'arbre 3", 2012-2013 Courtesy Galerie RX
À l’exception de motifs plus abstraits, les reflets de sources lumineuses de Fakestars, les natures mortes de Recomposition II qui traduisent un même sens de l’observation des signes du monde contemporain, le corps apparaît comme le dénominateur commun des recherches de Denis Darzacq.
L’artiste le conçoit comme une sculpture. Mais une sculpture sociale car le corps ne peut être extrait du contexte avec lequel il interagit.
L’artiste en fait l’outil d’une critique des difficultés et des stigmatisations auxquelles se heurtent certains groupes, tout particulièrement les jeunes des quartiers défavorisés ou des zones relé- guées, plus globalement, comme dans Act, les populations en marge. Denis Darzacq pointe les contraintes et les contradictions sociales. Mais il invite aussi, par la rupture de gestes dépour- vus de sens, à affirmer une identité toujours plus complexe que celle qui nous est assignée et à reconquérir une forme de liberté là où elle semble avoir disparu. »
Étienne Hat
Maison Européenne de la Photographie
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