Du 06 mai au 20 juin 2015
Si au gré de ses peintures, de ses céramiques et de ses dessins, Raynald Driez s’est d’abord fait l’apôtre de la chair joyeuse et espiègle, volontiers voluptueuse, celle-ci a pu prendre par la suite des teintes plus vénéneuses avec l’exposition Chrysalida, un brin fin de siècle, dans un dialogue revendiqué avec l’esprit d’un Verlaine licencieux, alias Loyola.
Pour cette troisième exposition personnelle à la galerie Polad-Hardouin, l’ensemble des oeuvres présentées métamorphose à nouveau cette chair qui, dans un phénomène de conversion, devient désormais le lieu du sacré, de l’aspiration vers ce qui nous dépasse et ne s’explique pas.
"Croix N°6" , 2015 de Raynald Driez - Courtesy Galerie Polad Hardouin
L’univers que Driez déploie dans ces peintures - où crânes, croix et vanités côtoient des vierges et des nus - n’est pas sans évoquer la rhétorique visuelle baroque qui s’attachait à rendre visible l’invisible, par le biais d’une grammaire de l’ostentation.
La croix devient ici l’élément omniprésent et structurant de ses peintures. On la retrouve multiple et protéiforme dans un cabinet de curiosité, rassemblant vanités et ciboires sous la présence à la fois protectrice et hiératique d’une poupée cagoulée.
On la retrouve sujet unique d’une pein- ture, rayonnante, présente, semblant sortir d’une nuit dense. On la retrouve enfin dans l’Imitation de Furrius. Une femme aux jambes croisées, nue, dont la position évoque certains modèles d’Egon Schiele, et qui nous adresse un regard plein d’une tendresse trouble, lovée tout contre cette croix éclatante.
"L'imitation de Furrius", 2014 de Raynald Driez - Courtesy Galerie Polad Hardouin
"Croix N°4", 2015 de Raynald Driez - Courtesy Galerie Polad Hardouin
Les fonds métalliques apportent un éclat particulier à cet ensemble : aux fonds d’or si présents dans la peinture religieuse, Driez préfère faire émerger de l’obscurité l’éclat singulier du cuivre et de ses teintes vibrantes, évoquant celles de la peau.
Du côté des céramiques, les vierges et les nus composent un panthéon tout personnel : vierge noire au coeur blessé d’où jaillissent deux serpents, jeunes femmes allongées aux chevelures de Gorgone, ou bien cette autre madone qui, dans un raccourci étonnant,tient dans ses bras non plus l’enfant mais le crâne du Golgotha. Ce dernier fait écho à ces crânes plus grands que nature, dont les couleurs chamarrées et miroitantes invitent furtivement le spectateur à la contemplation.
La soif (de) grandiose, se découvre aussi dans ses poèmes - un recueil sera publié à l’occasion. Toujours sur le fil, balançant entre quête de spiritueux et de spirituel, à michemin entre la farce et le sérieux, le narrateur tel un piéton de Paris grisé, déambule “de chapelles en troquets”, selon le caprice de ses itinéraires nocturnes.
"Grande Vanité", 2014 de Raynald Driez - Courtesy Galerie Polad Hardouin
"Crane rose", 2014 de Raynald Driez - Courtesy Galerie Polad Hardouin
Raynald Driez est né en 1974 en Vendée, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
Il est diplômé de l’École des beaux-arts de Bordeaux, qu’il fréquente de 1994 à 1999. Plusieurs expositions personnelles lui ont été consacrées en France, et en particulier à la galerie Déborah Zafman et à la galerie Polad-Hardouin à Paris.
Depuis plusieurs années, il enseigne l’art au sein de l’association La Source, fondée par Gérard Garouste.