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L'ACTUALITÉ DES EXPOSITIONS ET DES FOIRES INTERNATIONALES D'ART CONTEMPORAIN À PARIS ET EN ÎLE-DE-FRANCE. EXHIBITION IN PARIS

05 Sep

Expo Peinture Contemporaine: Eugen GABRITSCHEVSKY (1893-1979)

Publié par Eric SIMON  - Catégories :  #Expo Peinture Contemporaine

Expo Peinture Contemporaine: Eugen GABRITSCHEVSKY (1893-1979)

Du 8 juillet au 18 septembre 2016

 

« Toute ma vie était devant moi comme une large rue illuminée de soleil; je voyais si clairement vers où je devais me tourner et maintenant tout a sombré dans l’ombre. »

Propos d’Eugen Gabritschevsky.

 

La maison rouge présente pour la première fois à Paris une grande exposition consacrée à l’oeuvre de l’artiste russe Eugen Gabritschevsky (1893-1979).

"Sans titre", 1939 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1939 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1939 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1939 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1944 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1944 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

Eugen Gabritschevsky est né à Moscou en 1893 dans une famille de cinq enfants, issue de la grande bourgeoisie, cultivée et polyglotte, typique de la Russie tsariste.

Après des études scientifiques de haut niveau en biologie et génétique des insectes, il quitte l’Union Soviétique en 1924 pour rejoindre un laboratoire de recherche de l’université de Colombia aux États-Unis.

Malgré sa grande intelligence, qualifiée d’originale par son entourage, et sa vaste culture, il est sujet à de graves troubles psychiques, qui l’empêchent progressivement de poursuivre sa carrière scientifique et de mener une vie affective stable.

En 1926, il rejoint Münich où vit son frère, Georg.

En 1931, il est interné définitivement jusqu’à sa mort

en 1979. Eugen Gabritschevsky aura donc vécu, hormis la période de la guerre, près de cinquante ans à l’hôpital psychiatrique de Haar-Eflingen à la périphérie de Münich.

 

L’abandon de ses activités scientifiques laisse place à l’éclosion, sur trois décennies, d’une oeuvre riche et foisonnante, réalisée dans le silence et la solitude. L’exposition couvre cette période prolifique, mais présente également, et pour la première fois, des oeuvres réalisées avant 1929 – des dessins au fusain sur papier de format raisin, à l’esthétique sombre et angoissée, mystique et fantastique.

"Sans titre", 1945 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1945 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1948 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1948 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1946 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1946 de EUGEN GABRITSCHEVSKY

Le parcours de l’exposition est à la fois chronologique et thématique : le paysage, habité ou désert ; la ville et ses foules ; la nuit, ses carnavals, ses fêtes et ses concerts ; les phénomènes de mutations, de déformations du corps, et d’hybridations ; les bestiaires d’êtres fabuleux. Les techniques qu’il déploie, frottage, tamponnage, grattage, prouvent sa liberté d’expression et la maîtrise de son art.

C’est grâce à Jean Dubuffet, que l’oeuvre a trouvé une visibilité. Il est informé de son existence

dès 1948, en possède 4 en 1950 et décide d’en acheter 71 pour sa Compagnie de l’art brut en 1960.

Il avertit par la suite son ami Alphonse Chave, galeriste à Vence, qui décide aussitôt, avec son fils Pierre, de rendre visite à l’artiste pour acquérir l’essentiel de sa production et l’exposer régu- lièrement.

La galerie Chave cèdera peu après, autour de 600 dessins à la galerie Daniel Cordier, qui défendit l’oeuvre pendant plusieurs années, avant de faire un don important en 1989 au Musée National d’Art Moderne. Cet ensemble est aujourd’hui en dépôt aux Abattoirs de Toulouse.

 

De nombreux dessins ont été logiquement dispersés dans des collections privées au cours des années, mais l’exposition propose une sélection qui restitue très fidèlement l’esprit de l’artiste, la singularité et la force de son travail. Elle réunit 250 oeuvres parmi les milliers de dessins produits et un ensemble d’archives (photographies et correspondances de l’artiste).

Cette exposition et le catalogue qui l’accompagne sont réalisés en partenariat avec la Collection de l’Art Brut à Lausanne et l’American Folk Art Museum à New York où elle seraprésentée successivement à l’automne 2016 et au printemps 2017.

"Sans titre", 1949 de EUGEN GABRITSCHEVSKY -

"Sans titre", 1949 de EUGEN GABRITSCHEVSKY -

"Sans titre", 1942 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Collection Adam Reich

"Sans titre", 1942 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Collection Adam Reich

"Sans titre" de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre" de EUGEN GABRITSCHEVSKY

"Sans titre", 1952 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE

"Sans titre", 1952 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE

"Sans titre", 1942 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

"Sans titre", 1942 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

« Eugène Gabritschevsky va là où personne n’est jamais allé, pour atteindre fût-ce au prix du plus grave déséquilibre,  le point où la vie révèle la splendeur terrifiante de ses infinies métamorphoses entre l’organique et l’inorganique, le végétal et le minéral, l’humain et l’animal… Déséquilibre qui n’est pas folie mais plutôt nécessaire « dérèglement de tous les sens » semblable à celui dont parle Rimbaud pour demander aussi au poète de se charger de « l’humanité, des animaux même ». Justement ce que n’a cessé de faire Gabritschevsky en s’identifiant depuis l’enfance à chaque vie dont il voulait pénétrer le mystère, jusqu’à finir par passer de l’autre côté.

De l’autre côté où, au plus loin de toute démarche concertée, se découvre l’imprescriptible liberté de devenir celui qui assiste au grand spectacle de l’être. Pour Rimbaud, c’est ainsi et seulement ainsi que le poète « arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues ». Sans oublier cette précision essentielle : « Si ce qu’il rapporte de là-bas a forme, il donne forme ; si c’est informe, il donne de l’informe ». Et elle n’a pas d’autre explication, la constante diversité de forme et de facture avec laquelle se confond la singularité de Gabritschevsky, ni « artiste schizophrène » ni savant exalté, mais devenu voyant pour nous rapporter l’inépuisable richesse de ses cargaisons ?d’inconnu. Comment alors ne pas être pris de vertige devant la faune et la flore toujours en gestation d’une multitude de mondes perdus ou à venir, avec leurs théâtresjungles, leurs villes en partance et leurs horizons de dérive, que pourraient tout aussi bien nous avoir fait découvrir, du plus profond de leur nuit, Victor Hugo, Arnold Böcklin, Emil Nolde, Léon Spilliaert, Yves Tanguy, Max Ernst, André Masson, Victor Brauner, Oscar Dominguez, Henri Michaux.

Dans le domaine plastique, je ne sais personne à avoir suivi ce chemin de haut péril et de haut savoir. C’est ainsi que Gabritschevsky aura tout risqué, et bien sûr « l’intelligence de ses visions », jusqu’à se faire le medium d’une modernité en quête d’elle-même et nous montrer alors, formelle, informelle, mais toujours déferlant des ténèbres, la vie. »

Valérie Rousseau, Morphologie de l’imperceptible

Extrait du texte publié dans le catalogue de l’exposition Eugen Gabritschevsky 1893-1979, éditions Snoeck, 2016.

"Sans titre", 1950 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Collection l'Art Brut, Lausanne

"Sans titre", 1950 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Collection l'Art Brut, Lausanne

"Sans titre", 1950 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

"Sans titre", 1950 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

« Ce monde alternatif que Gabritschevsky a créé conserve l’empreinte de son cheminement en génétique (de l’étymologie, « donner naissance »), qui s’enracine chez lui très tôt, depuis l’observation de variations subtiles – modification de formes et polymorphisme, couleurs et sensibilité chromatique, jusqu’à l’étude plus spécifique des phénomènes de mutations et de mimétisme. La résurgences de ses connaissances scientifiques, appliquée à la création d’oeuvres d’art, rappelle les mécanismes de l’automatisme créatif.

"Sans titre", 1949 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

"Sans titre", 1949 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

"Sans titre", 1947 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

"Sans titre", 1947 de EUGEN GABRITSCHEVSKY - Courtesy Galerie CHAVE, Vence

« La main du peintre, écrit André Breton à propos d’André Masson, […] n’est plus celle qui calque les formes des objets mais bien celle qui, éprise de son mouvement propre et de lui seul, décrit les figures involontaires dans lesquelles l’expérience montre que ces formes sont appe- lées à se réincorporer. » S’adaptant aux qualités respectives des supports disponibles, trouvés dans son environnement immédiat (papier calque, papier radiographique, pages glacées d’un magazine, feuilles perforées, notes administratives), Gabritschevsky étend la gouache et l’aquarelle au doigt et au pinceau, combinant différents procédés (frottage, pliages, tachisme et grattage, création de motifs à l’aide d’éponges, de chiffons ou de décalcomanie) propices à l’apparition de formes aléatoires et suggestives, qu’il affine ensuite au pinceau ou au crayon.

Gabritschevsky écrit qu’« il y a certains procédés dans la peinture (ainsi que dans la poésie) qui emploient ‘l’imprévu’ pour vous mettre en contact direct avec l’essence magique de la nature ».

Eugene Gabritchevsky Haar bei Munchen 1969

Eugene Gabritchevsky Haar bei Munchen 1969

En somme, que l’inattendu et l’aléatoire, dans l’art comme dans la science, s’inscrivent à la base des connaissances. On sait que les hypothèses et les avancées, dans la profession scientifique, résultent souvent d’événements fortuits.

Dans la manière scientifique de Gabritschevsky réside une part d’imaginaire et une pensée créative singulière qui ouvrent des perspectives inattendues.

Comme l’observe son frère Georges, « ce n’était pas une science sèche bâtie seulement sur des conclusions logiques ; c’était un travail plein de visions artistiques, des lois fondamentales de l’être. »

La sensibilité particulière qui caractérise son œuvre jaillit du contraste entre sa grande maîtrise la sophistication de son dessin, le geste réfléchi qui aborde la surface, l’étendue de sa connais- sance de l’invisible, la vastitude de ses capacités intellectuelles et l’atmosphère indistincte, voire suspendue, dans laquelle baignent ses sujets, qui rappelle certains aspects de la production de Max Ernst, réalisée dans le contexte de son exil aux États-Unis durant la Seconde Guerre mondiale.

Debraine écrit, à juste titre, qu’« à plusieurs reprises [Gabritschevsky] semble dépeindre la vertigineuse danse aléatoire d’où est sortie la vie. » Cet arrêt du temps réel de sa propre vie, il l’admettra en 1946 :

« J’ai quitté la vie normale et productive depuis si longtemps qu’on peut me compter une âme morte, une personne enterrée […], une sorte de ruine qui ne vit que de ses souvenirs et disparaît comme un crépuscule morose à jamais. » S’enfonçant toujours plus loin, par nécessité ou par volonté, dans les confins de ses recherches, s’est-il engouffré ou retrouvé de l’autre côté de l’oculaire de son microscope? Calquant le mouvement de cette immersion sans retour, l’oeuvre prolifique de Gabritschevsky forge une vision intégrale de l’en-deçà du vivant, une forme de genèse, ou de morphologie, de l’imperceptible. »

 

La Maison Rouge

fondation antoine de galbert

10 bd de la bastille

75012 paris France

 

www.lamaisonrouge.org

 

 

Horaires d'ouverture: Du mercredi au dimanche de 11h à 19h. Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h

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