Expo Artiste du XIX ème Siècle: GAUGUIN « l’alchimiste »
Du 11 octobre au 22 janvier 2018
L’histoire de l’art traditionnelle a fait la part belle à la peinture de Paul Gauguin (Paris, 1848 - Atuona, îles Marquises, 1903) dont le nom évoque de somptueuses toiles aux couleurs oniriques, d’inspiration bretonne ou polynésienne.
Le propos de l’exposition est d’élargir cette vision à l’œuvre multiforme d’un artiste à la fois peintre, sculpteur, graveur, céramiste et écrivain et d’expliquer son processus créateur singulier.
"Double portrait de GAUGUIN par PISSARRO et PISSARRO par GAUGUIN", 1880 Courtesy Musée d'Orsay © Photo Éric Simon
"Portrait de l'Artiste au Christ Jaune", 1890 de Paul GAUGUIN - Courtesy Musée d'Orsay © Photo Éric Simon
GAUGUIN L’ALCHIMISTE
Gauguin s’est exprimé sur l’art et a clairement formulé l’idée, présente déjà au XVIe siècle chez Léonard de Vinci, que la peinture est d’abord l’expression d’une intériorité.
Si la peinture est pour Gauguin «le plus beau de tous les arts », il s’intéresse également à d’autres disciplines qu’il aborde de manière très libre et décomplexée : en sculpture sur bois, en céramique et en gravure, il fait preuve d’une grande inventivité formelle et technique, pour des résultats parfois inattendus.
La céramique, à laquelle il a été initié à vingt-neuf ans par Ernest Chaplet (1835-1909), lui apparaît comme une discipline majeure. Il s’y adonne à partir de 1886 et en souligne l’importance dans ses écrits : « La céramique n’est pas une futilité.»
À la manière de l’alchimiste qui étudie et tente de transformer la matière dans un creuset, Gauguin transfigure par la cuisson une matière en apparence modeste, il aime son aspect brut et a réalisé une centaine de pièces.
"Paysage, Pont-Aven", 1888 de Paul GAUGIN - Courtesy TOKYO, The National Museum of Art © Photo Éric Simon
"Lavandières au bord du canal", 1888 de Paul GAUGUIN - Courtesy Museum of Modern Art, New York © Photo Éric Simon
GAUGUIN SCULPTEUR
Cette part de la création de Gauguin est moins connue alors qu’il manifeste très tôt un grand intérêt pour l’art en trois dimensions, allant jusqu’à considérer qu’il y avait des aptitudes plus grandes que pour la peinture. dans l’enfance, puis durant ses voyages en tant que matelot, il taille le bois au couteau. Le caractère hybride et exotique de ces premières créations se retrouve ensuite dans les sculptures produites à Tahiti.
Ces «idoles » mêlant bois et matériaux divers et dont les références et les formes sont empruntées à diverses cultures offrent une esthétique radicale.dans ses recherches, l’artiste tente d’abolir les frontières entre les arts, les mêlant parfois, ou empruntant les caractéristiques de l’un pour faire évoluer l’autre.
Ainsi, il taille d’une manière très proche ses sculptures et planches de bois destinées à la gravure.
"Baigneuse, Étude pour "La Baignade"", 1887 de Paul GAUGUIN - Courtesy The Art Institute of CHICAGO © Photo Éric Simon
L’INITIATEUR D’UN ART RÉNOVÉ
Marin jusqu’à vingt-six ans, Gauguin fait ses débuts dans l’art en autodidacte, alors qu’il est agent de change. Il est remarqué par les impressionnistes Camille Pissarro (1830-1903) et Edgar degas (1834-1917) qui l’invitent à rejoindre leur groupe. Il expose à leurs côtés de 1879 à 1886 et bénéficie de leur exemple. Sa touche divisée et rapide évoque Pissarro mais, rapidement, il emprunte à degas ses cadrages insolites et ses éclairages artificiels. La rupture survient en 1884 quand il se met à rejeter la primauté de l’observation et de la sensation pour la subjectivité de l’artiste. Lorsqu’il participe à la VIIIe exposition impressionniste en 1886, il est en total désaccord avec les nouveaux venus, Seurat et Signac.
Comme le peintre Odilon Redon (1840-1916), il revendique la supériorité du rêve sur le réel. Gauguin est résolument symboliste. Selon lui, le langage de la peinture est la couleur, comme le mot est celui de la poésie.
À son tour, il théorise et transmet. C’est en Bretagne, en 1888, que le jeune Paul Sérusier (1864-1927) peint sous la dictée de Gauguin un petit paysage presque abstrait, retranscrit avec des couleurs pures, sans ombres ni dessin.
Véritable manifeste, le tableau prendra pour les Nabis (un groupe de jeunes peintres indépen-dants) le nom évocateur de «Talisman ».
"Ahaoe Feii?" (Eh quoi! tu es jalouse?), 1892 de Paul GAUGUIN - Courtesy Musée d'État des Beaux-Arts, MOUSCOU © Photo Éric Simon
"Noa Noa (Embaumé, embaumé)", 1895 de Paul GAUGUIN - Courtesy The Art Institute of CHICAGO © Photo Éric Simon
FUIR LÀ-BAS ! FUIR ! (IN. BRISE MARINE, STÉPHANE MALLARMÉ, 1865)
Est-ce le fait d’avoir passé les six premières années de sa vie au Pérou ou d’avoir sillonné les mers, lorsqu’il était dans la marine, que Gauguin ne peut résister au besoin de partir toujours plus loin ?
Il s’inscrit ce faisant dans les pas des peintres et écrivains qui l’ont précédé comme Stéphane Mallarmé (1842-1898), dans la recherche d’un ailleurs qui soit à la fois rupture de civilisation et quête de soi. Partir, c’est fuir la cherté de la vie parisienne et surtout se confronter à un ailleurs propre à alimenter une inspiration nouvelle.
Il dit chercher le «primitif», le «sauvage ». Il se rend en Bretagne d’abord (de 1886 à 1890), région où les traditions sont restées vivaces, puis à Tahiti à deux reprises, en Martinique et enfin aux îles Marquises où il finira ses jours en 1903.
Il s’immerge dans la culture locale, se mêle aux habitants dont il veut adopter mœurs et croyances. Très vite déçu par l’occidentalisation et la perte des traditions dans la société tahitienne, il s’appuie sur les quelques traces matérielles conservées dans des collections particulières et se plonge dans la lecture de l’ouvrage ethnographique Voyage aux îles du Grand Océan de Jacques-Antoine Morenhout, publié plus de 50 ans plus tôt. Sa démarche n’est pourtant pas celle d’un ethnologue. Partant du choc culturel, il assimile, mêle les sources visuelles puis crée un art personnel insolite, entre réel et imaginaire.
"MERAHI METUA NO TEHAMANA (Les aïeux de Tehamana)", 1893 de Paul GAUGUIN - Courtesy The Art Institute of CHICAGO © Photo Éric Simon
"MANAO TUPAPAU (L'esprit veille)", 1892 de Paul GAUGUIN - Courtesy BUFFALO, Collection Albright-Knox Art Gallery © Photo Éric Simon
"ARRI MATAMOE (La fin Royale)", 1892 de Paul GAUGUIN - Courtesy LOS ANGELES, The J. Paul GETTY Museum © Photo Éric Simon
"Panneaux Scuptés de la Maison JOUIR", 1901 de Paul GAUGUIN - Courtesy Musée d'Orsay, PARIS © Photo Éric Simon
Paul Gauguin (1848-1903) est l’un des artistes français majeurs du XIXe siècle et l’un des plus importants précurseurs de l’art moderne. L’exposition du Grand Palais retrace son étonnante carrière, dans laquelle il a exploré les arts les plus divers : peinture, dessin, gravure, sculpture et céramique. Les chefs-d’œuvre réunis mettent en avant le travail de l’artiste sur la matière ainsi que son processus de création : Gauguin bâtit son art sur la répétition de thématiques et de motifs récurrents.
Commissaires: Claire Bernardi, conservateur peinture au musée d’Orsay,
Ophélie Ferlier-Bouat, conservateur sculpture au musée d’Orsay.
Gloria Groom, Senior curator, chair of the European sculpture and painting department, Art Institute, Chicago.
Exposition coproduite par le musée d’Orsay et la Réunion des musées nationaux- Grand Palais et organisée avec l’Art Institute de Chicago.
Grand Palais, Galeries nationales
3, av du Général Eisenhower
75008 Paris
Horaires : Les horaires d’ouverture du Grand Palais dépendent des expositions ou des événements qui s’y déroulent