Exposition Solo Show: Lucien MURAT «One To Rule Them All»
"Mutation des 3 frères, naissance de Mégathesis", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
Du 7 décembre 2019 au 25 janvier 2020
"Leurs visages, grimacés par la peine, vident leurs réservoirs à complaintes élégiaques,
Pleurent leurs cieux tant aimés desquels elles furent injustement séparées.
Pourquoi les avions finissent-ils toujours par s’écraser ?"
Lucien Murat
Pour sa première exposition personnelle à la Galerie Suzanne Tarasieve, Lucien Murat présente une pléiade de tapisseries apocalyptiques. Lʼartiste français, récompensé en 2015 du Prix Arte/Beaux-Arts Magazine place au centre de ses œuvres le récit mythologique quʼil a créé : dans un monde ravagé et hostile, le démiurge Mégathesis, héros doté de trois bras, de quatre jambes et dʼune tête lacérée, enfanté par la déesse Vina, engendra un jour en vomissant toute la bile de son corps la naissance de cinq mondes, cinq abominations liées aux cinq sens : Haptomaisaker (le toucher), les Anhomakers (la vue), les Akoetors (lʼouïe), Téhamaker (le goût), Osmekor (lʼodorat).
On accompagne ainsi le héros affrontant ces cinq mondes cruels. Il nʼest jamais à lʼabri des tirs de laser, des jets de pétrole enflammé, des bucranes radioactifs et des projectiles mortels. Les protagonistes évoluent et se combattent devant un arrière-plan nerveux, électronique mais ne se soucient guère de ce cadre – ils le dépassent, lʼendommagent et le fracassent.
"Chute des crânes de la colère", 2019"Dessin", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
"Chute des crânes de la colère", 2019"Dessin", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
"Dessin", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
Étranges sans être étrangères, les images de Lucien Murat ne peuvent que difficilement laisser indifférent, et ce parce quʼau-delà de leur violence crue, elles sont structurées par un réseau dʼantagonismes, dʼassemblages et de confrontations, de citations et de créations.
Attentif à lʼhistoire de lʼart & craft, lʼartiste hybride les techniques pour annuler les persistantes dichotomies entre le high et le low, le Beau et le populaire, bref, entre lʼart et lʼartisanat. Il sʼempare alors des subcultures (jeu vidéo, bande dessinée, canevas, science-fiction) pour générer des alliances avec la peinture, le cinéma, la sculpture et la tapisserie et crée ainsi une délicieuse mais improbable alliance le pixel et le point de la tapisserie révèlent leur incontestable parenté.La cohabitation des techniques (acryliquesur patches, bâches et tapisseries chinées) et références génère un chaos, une violence, une explosion, un vertige, une résistance.(1)
"Mégathesis tue le dernier frère", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
"Mort du frère", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
"Dessin", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
Le vacarme est assourdissant. Les chocs de ferraille, les aboiements et hurlements de chiens monstrueux et les incessantes détonations sonnent le glas dʼune ère sombre comme un hallali funeste. Cyborgs, mutants, taureaux et chiens se combattent à tirs de lasers et de jets de pétrole enflammé ou dʼacide sous une odeur suffocante dʼhuile, dʼasphalte brûlé, de gaz toxiques, de métal et dʼhydrocarbures.
Ces impitoyables duels et chasses apocalyptiques, accompagnés tantôt des sourds vrombissements de courants électriques, tantôt du crépitement des pixels se jouent dans un espace rythmé par une géométrie dʼécrans informatiques en perte de connexion et de projections de canevas. On assiste dans ce complexe paysage à des combats, des naissances, des viols et des poursuites.
"Vina donne naissance à troisfils", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
"Naissance de Mégathesis", 2019 de Lucien MURAT - Courtesy de l'artiste et la Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS © Photo Éric Simon
Dans ses tapisseries mêlant lʼesthétique vidéoludique des années 1990 et celle des canevas traditionnels montrant des paysages champêtres, des scènes religieuses ou des rencontres galantes, lʼartiste crée un travail loquace et polysémique qui gagne tout de même à être lu en considérant ce que lʼon a nommé condition ou art « post-internet », parce quʼelles en dérivent. Ses images sont paradoxales, impossible de ne pas y voir notre ère, en même temps quʼelles montrent un présent presque passé, déjà légèrement suranné.(2)
Les scènes mythologiques qui sʼy jouent illustrent à la manière des mythes grec antiques les erreurs et les vices que nous sommes condamnés à répéter. Lʼécriture mythologique est un recours pour donner un sens à lʼinexplicable, or Internet a créé un invisible, un insondable. Mégathesis apparaît ainsi comme le guide dʼune nouvelle réalité, virtuelle, et dʼun avenir qui lʼest autant.(3)
1, 2 Julie Crenn, tiré du catalogue de lʼexpostion, One to Rule Them All, Galerie Suzanne Tarasieve, Paris, 2019.
3 Clément Thibault, tiré du catalogue de lʼexpostion, One to Rule Them All, Galerie Suzanne Tarasieve, Paris, 2019.
Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS
7, rue Pastourelle
75003 Paris
Horaires d'ouverture: du mardi au samedi de 11h à 19h.