Hicham BERRADA « Vestiges »
"Carte mère #13", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Du 3 février au 18 mars 2023
Depuis ses débuts, Hicham Berrada s’ingénie à créer de nouveaux mondes en apprivoisant les lois de celui que nous connaissons.Ces lois, qu’elles soient chimiques, biologiques ou encore physiques lui servent à générer des images fantastiques de paysages potentiels.
Pour « Vestiges », sa troisième exposition à la galerie, Berrada nous convie à observer les métamorphoses de circuits imprimés. Objets plus ou moins méconnus des usagers et pourtant indispensables, les circuits imprimés centralisent et gèrent les connexions présentes dans les outils technologiques qui peuplent notre quotidien. Ils sont les « cœurs » de nos ordinateurs et de nos téléphones portables.
"Terre future, après la pluie", 2022 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Détail "Terre future, après la pluie", 2022 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Détail "Terre future, après la pluie", 2022 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Composés de différents métaux, tels l’argent, le cuivre, le palladium, le platine et l’or, les circuits imprimés sont, de par leur complexité, des monuments en soi à la pensée humaine. Des monuments hélas éphémères, car où sont nos portables d’antan ?
Les composants informatiques deviennent obsolètes au rythme du progrès technologique et criblent la planète Terre de leur poids mort tout en revenant à leur matérialité pure : assemblages aux formes variables de métaux et d’alliages divers.
Face à ce phénomène, Hicham Berrada explore trois médiums pour évoquer trois états physiques et temporalités.
À travers une série de vidéos inédites, le visiteur découvre ainsi quatre circuits imprimés en décomposition dans une solution électrolytique qui nous rappelle que le monde digital a sa matérialité propre, et que celle-ci s’use, vieillit et pollue.
"Carte mère #12", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
"Carte mère #15", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
La contemplation distanciée de cet objet manufacturé si complexe nous renvoie à notre propre corporéité, et sa destruction apparaît alors comme un paradoxe.
S’agit-il d’un monde post-apocalyptique dans lequel l’organique prend le pas sur le technologique, au sein duquel les métaux se dissolvent dans l’océan et les villes partent en fumée ?
Ou bien est-ce une Terre des temps éloignés abandonnée pour de bon par les Hommes ?
Faut-il y voir là une sorte de vanité du monde contemporain ?
Une désagrégation et une décomposition sont également convoquées physiquement au sein de l’espace d’exposition, même si ces dernières échappent quasiment à nos capacités de perception. Semblant tout droit sorti d’un musée de Sciences naturelles, le terrarium exposé en regard montre quant à lui une image de l’anthropocène.
Le terreau naturel, où nichent plantes et mousses, s’observe jonché de circuits imprimés désaffectés, et les éléments métalliques qui les constituent dévorés par le mycélium de champignons que l’artiste a introduit sciemment pour favoriser l'absorption de tout ce qui le contamine.
"Carte mère #17", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
"Carte mère #18", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Utilisé pour réhabiliter les sites d’anciennes manufactures, déchèteries et autres lieux d’accidents technogènes, ces champignons sont des vrais agents clandestins.
Lentement mais sûrement, ces derniers rongent et transforment les composants informatiques dans une performance post-humaine, qui bien qu’invisible à l’œil nu n’en est pas moins réelle.
Seule cette odeur marquée de terre après la pluie, que l’on nomme pétrichor, trahit leur présence insolite. Dans ce dispositif imaginé par l’artiste, nos circuits imprimés d’hier s’en retournent ainsi progressivement à la « Terre », une Terre qui prend pleine possession olfactive de l’espace d’exposition.
Les lois de la nature et les agents organiques sculptent ici l’œuvre avec l’artiste, et nous invitent à méditer sur le devenir de l’humanité et les choses qui risquent de lui survivre.
"Carte mère #16", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Enfin, dans la dernière salle, le visiteur découvre, émergeants de la pénombre, différents blocs de résine enfermant des paysages figés à tout jamais.
Pour cette troisième évolution, Berrada a plongé les circuits imprimés dans des bains électrolytiques au sein desquels les lois chimiques ont réorganisé les métaux qui les composent pour en faire des cristaux, des falaises, des rochers, des arbres fantomatiques, des paysages d’une planète inconnue, d’un monde autre et fantasque.
Médusées, ces formes évoquent les vestiges d’une archéologie futuriste, ou plutôt contiennent des pépites, des éléments épars de notre passé récent, tels des morceaux d’ambres qui auraient capturé pour l’éternité des espèces d’insectes qui n’existent plus.
"Carte mère #6", 2020-2023 de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Les « Vestiges » d’Hicham Berrada s’exposent à la fois comme un ensemble d’agencements alternatifs d’éléments chimiques, que comme une autre piste écologique ou encore le panorama d’un monde parallèle dans lequel les matières terrestres suivraient une tout autre organisation.
Affranchi.e.s de repères temporels, nous autres visiteurs ses, pouvons-nous projeter dans un passé préhistorique, un présent technologique ou un futur probable, espéré ou redouté.
— Alexandra Khazina
Vidéo de Hicham BERRADA - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Kamel MENNOUR - Paris © Photo Éric Simon
Né en 1986 à Casablanca (Maroc), HICHAM BERRADA vit et travaille à Paris et à Roubaix (France). Utilisant une démarche scientifique, le travail d’Hicham Berrada associe intuition et connaissance, science et poésie. Il s’inspire de protocoles scientifiques pour explorer des phénomènes qu'il mobilise « comme un peintre maîtrise ses pigments et pinceaux, qui sont dès lors le chaud, le froid, le magnétisme, la lumière ».
Son travail a été présenté dans le cadre de nombreuses expositions personnelles et collectives :au Centre Pompidou, Paris ; au Palais de Tokyo, Paris.
Il a pris part à plusieurs biennales : Taipei Biennial ; Yokohama Triennale ; Biennale de Lyon ; BIM–Biennale de l’Image en Mouvement, Genève et Biennale de Yinchuan (Chine).
Hicham Berrada a été nommé pour le Prix Marcel Duchamp 2020.
À partir du 8 février 2023, son œuvre Présage est présentée à la Bourse de Commerce - Pinault Collection, Paris.
Galerie Kamel MENNOUR
47 rue Saint-André des Arts
75006 Paris
Jours et horaires d’ouverture : du mardi au samedi de 11h à 19h.
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