01 May

Nina MAE FOWLER « Just a little piece of leather stripped off the skin of life »

Publié par Eric SIMON - Catégories : #Expo Dessin Contemporain

"A lIttle piece: Part I", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

Du 25 mars au 6 mai 2023

Le titre de l’exposition personnelle de l’artiste anglaise Nina Mae Fowler est emprunté à une note de Marlon Brando, icône absolue du cinéma, écrite à l’hôtel Elysée de New York. Inspirée par la poésie du message de l’acteur américain « juste un petit morceau de cuir arraché à la peau de la vie », Fowler l’associe au corpus de ses nouveaux dessins dont les thèmes interrogent les notions de célébrité, de gloire, de sexualité et de secret.

Formée à la sculpture à l’université de Brighton, Nina Mae Fowler est principalement connue pour sa pratique du dessin en noir et blanc. Fascinée par la période de l’âge d’or Hollywoodien dès le plus jeune âge, l’artiste développe une pratique puissante traitant des archétypes féminins, notamment ceux des actrices dans la culture hollywoodienne. A partir d’archives de revues de presse et de scènes de films mythiques, Nina Mae Fowler s’emploie à la construction des images, accentuant le rendu cinématographique de ses œuvres.

"A lIttle piece: Part V", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"Leaning Board III, Stripped (Judy Garland)", 2023 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"A lIttle piece: Part III", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

Comme dans une salle de montage, elle rembobine, marque des pauses et coupe de manière obsessionnelle, n’hésitant pas à reprendre des détails de différents arrêts sur image qu’elle assemble sur le papier.

Scrutant au plus près l’apogée parfois éphémère et fulgurante des icônes adulées d’Hollywood, l’artiste aborde les thèmes binaires de peur et de désir, de tragédie et d’héroïsme, de lumière et d’obscurité, de beauté et de laideur. Réalisés avec précision et minutie, les dessins de Nina Mae Fowler interrogent notre fascination pour les personnalités publiques souvent borderline, usées par le système hollywoodien et la presse à scandale.

Cet acharnement est illustré par la série des touchants portraits de Rita Hayworth photographiée par des paparazzis à sa descente d’avion après une crise de démence lors du vol. Chevelure ébouriffée, yeux hagards, l’actrice semble ailleurs, sans repères.

"Love Godness: Part II", 2023 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"Love Godness: Part IV", 2023 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

Dans sa nouvelle série A little piece, Fowler mentionne moins l’histoire personnelle de Jean Peters, seconde épouse d’Howard Hughes, et se focalise sur l’émotion de l’extrait de film où l’actrice allongée par terre reçoit un liquide étincelant sur le visage.

Pourtant, le triste quotidien du couple (tous deux vivaient dans des appartements séparés à cause de la maladie mentale de Hughes) ne peut s’extraire de la figure de la détresse de Peters représentée par Fowler. Cette déconstruction du regard s’opère à travers ces assemblages qui donnent un nouveau visage à l’actrice, à la fois source d’effroi et de délectation.

Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"A lIttle piece: Part VII", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"Leaning Board II, Stripped (Elisabeth Taylor)", 2023 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

La maitrise technique de Nina Mae Fowler lui avait permet de réunir Marylin Monroe, Bette Davis, Jayne Mansfield et Marlene Dietrich dans un grand format devenu célèbre, Every girl crazy ; Fowler réalise cette fois des images plus intimistes, accentuant la sexualisation des personnages ou bien dévoilant leurs faiblesses. Alternant grands et moyens formats dans ses nouvelles séries, l’artiste orchestre avec brio sa pratique d graphite comme elle façonne l’argile de ses sculptures pour créer une tension tangible et tactile à ces nouveaux visages. Les icônes deviennent alors des femmes vivantes, vibrantes, heureuses ou malheureuses, comme dans la série Love Mass où l’on découvre une Marlene Dietrich maternelle et aimante, loin du glamour qu’on lui connaissait.

"If I would die tomorrow", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"Can't you stay a little while", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

"The Geraniums peek inside", 2022 de Nina MAE FOWLER - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Suzanne TARASIEVE Paris © Photo Éric Simon

Les compositions monumentales de Fowler forment ainsi une continuité de la peinture d’histoire classique, où les dieux et déesses sont remplacés par les stars de rock et de cinéma. Bercée par les tableaux de Courbet et Manet, Fowler recherche la face cachée des évènements.

Sa vision stylistique nous enchante, alors même que son propos infuse une vérité sombre et dévastatrice, en témoignent la noirceur et les tourments de l’âme qui restent au centre de ses sujets. « Sans contraintes il n'est pas de progrès. Attraction et répulsion, raison et énergie, amour et haine, sont nécessaires à l'existence de l'homme »1

Face aux dessins et sculptures de Nina Mae Fowler, plus énigmatiques qu’ils n’y paraissent à première vue, il nous faut démêler un récit caché, aussi puissant que n’importe quel mythe ou légende antique.

- Béatrice Andrieux : Commissaire et critique d’art

1 - Le mariage du ciel et de l’enfer, William Blake, 1790

Galerie Suzanne TARASIEVE PARIS

7, rue Pastourelle

75003 Paris

https://www.suzanne-tarasieve.com/

Jours et horaires d’ouverture : du mardi au samedi de 11h à 19h.