Eric CROES « Comme un vieux tatouage »
Détail "Totem Blue Fisherman", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
Du 11 janvier au 24 février 2024
Le sculpteur belge Eric Croes présente ses dernières créations à l’espace Paris, Turenne de la galerie Almine Rech. Une plongée dans l’univers intime et dans l’œuvre singulière d’un artiste inspiré.
Lorsqu’il rentre de voyage, Eric Croes ne revient jamais les mains vides. L’artiste a pour habitude de conserver tout ce qu’il a vu et aimé, tout ce qu’il a aperçu sur sa route. Non pas dans les entrailles numériques de son téléphone portable. Mais dans des carnets, format passeport, qui ne quittent jamais sa poche. Eric note, dessine, reproduit en recouvrant les pages. Ses carnets deviennent sa mémoire, les traces et les preuves de toutes ses trouvailles et de ses expériences. De retour dans son atelier bruxellois, il recompose avec ses mains, il restitue à la terre tout ce qu’il a amassé en chemin.
"Totem Red Monkey"; "Totem Big Blue Monkey" et "Totem Blue Fisherman", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
"Yellow Pacific Palisades", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
"Santa Monica Mirrors", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
Ainsi les œuvres d’Eric sont toujours composites, hybrides. En façonnant des formes puissantes ou des vases profonds, des golems et des totems sortis de son imaginaire itinérant, il nous invite à suivre ses pas, à vagabonder à ses côtés. Ses créations portent et colportent à même la peau ses légendes intimes. Des souvenirs mêlés et emmêlés, du vécu et des fantasmes. On peut parfois reconnaître l’origine de ces visions. Il y a les escapades, réelles ou rêvées, de l’Italie au Japon.
Il y a les musées qu’Eric arpente depuis son adolescence, du Louvre au Met en passant par ses collections préférées de Bruxelles. Il y a la faune et la flore, ces animaux et ces plantes bien vivants ou mythiques — du pavot au singe, du centaure aux agrumes — qui reviennent fleurir et grandir sans cesse dans son travail. On trouve aussi des dates, des chiffres, des mots énigmatiques et secrets.
"Blue Lauenensee", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
"Yellow Petit Palais", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
"Blue Ohara Village", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
Chaque image est porteuse d’un souvenir, donc d’un sentiment, et traduit une émotion. Bonnes ou mauvaises, lumineuses ou troubles, elles nous racontent l’histoire d’Eric. De ses passions à ses obsessions, de son enfance à son quotidien. Tout ce qui l’inspire et le nourrit, tout ce qui l’obnubile et l’illumine.
Les plus petits monuments peuvent donner naissance à de grands souvenirs. Certains symboles se retrouvent changés, métamorphosés. Les figures conçues par Eric Croes sont ainsi couvertes de tatouages, habillées pour l’hiver. Un clin d’œil au titre de l’exposition — « Comme un vieux tatouage », emprunté à une chanson douce et mélancolique du chanteur belge Arno — qui sublime ces marques d’un passé enfoui toujours présent à la surface de nos vies.
"Green South Kesington", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
"Red Tozeur", 2024 de Éric CROES - Courtesy de l'artiste et de la Galerie Almine RECH - Paris © Photo Éric Simon
Pour la première fois, l’artiste met en scène les sources de ses créations. Dans une vitrine en bois ancien qui rappelle la scénographie des musées de la capitale belge, il nous présente ses carnets. La matrice de sa matière, en quelque sorte, dont il nous révèle les provenances multiples et les fondements infinis. Tout en conservant le mystère de ses assemblages, il nous offre une plongée dans sa pratique et nous permet encore plus de nous identifier, de nous retrouver dans ses œuvres.
Intimement liées à sa vie et ses découvertes, les sculptures d’Eric Croes transcrivent aussi un élan universel : une quête de beautés toujours plurielles, une traque passionnée d’amour et d’humour, un mélange de matières et de couleurs qui rappellent la polyphonie de nos existences, de nos fantaisies, de nos pulsions. Avec une grande maîtrise technique et une inventivité toujours plus libre, Eric Croes fait revivre et brasse tout ce qui le traverse et tout ce qu’il traverse. Pour mieuxle partager. Et pour mieux nous éblouir.
- Boris Bergmann, écrivain et critique
Galerie Almine RECH
64 rue de Turenne
75003 Paris
Jours et horaires d’ouverture : du mardi au samedi de 11h à 19h.