08 Jul

Caroline ACHAINTRE « The Seeker »

Publié par Eric SIMON - Catégories : #Expo Céramique Contemporaine, #Expo Peinture Contemporaine, #Expo Textile Contemporain

"Prompter", 2023 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

Du 23 mai au 20 juillet 2024

Avant d’avoir le langage et les histoires écrites, nous avions des images. Il existait des moyens de conserver et de communiquer des connaissances qui ne nécessitaient pas de mots; des moyens liés au corps et au mouvement, comme la forme d’une danse ou l’expression d’un visage, ou produits par le dessin et les images, comme les peintures rupestres.

Il existe un langage de l’imagination et une vie de l’esprit antérieurs au raisonnement logique et au besoin de catégorisation. Ce sont des modes de pensée profondément ancrés dans la culture et la psychologie humaines.

"GUMS", 2024 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

"Moderator", 2024 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

"RIC RAC", 2023 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

Rencontrer les œuvres de Caroline Achaintre, c’est faire une excursion dans cette autre vie de l’esprit. Ses créations sont pleines de personnalités idiosyncrasiques et de résonances psychologiques. Elles sont à la fois majestueuses et absurdes, transgressives et chaleureuses.

Tels des artefacts d’une civilisation perdue ou des créatures sorties des pages d’un bestiaire d’un autre monde, elles défient et jouent avec nos perceptions et nos émotions. Ils nous renvoient notre regard, ils nous collent à la peau, ils nous font rire, ils cachent des secrets, ils résistent à l’interprétation et posent des questions qui n’ont pas de réponse.

The Seeker (2024), une grande tapisserie tuftée à la main qui donne également son titre à l’exposition, oscille à la limite de l’étrange. Figure animiste ambiguë, elle a à la fois la présence d’une chauve-souris lugubre émergeant de l’ombre et celle d’un oiseau exotique dont les ailes étendues aux motifs complexes semblent agir comme une cape protectrice pour ses petits. Gardien ou prédateur ? Nous n’en sommes jamais tout à fait sûrs.

"Crystalline", 2023 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

"Wimperz", 2023 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

"MAW", 2024 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

Nous aimons donner un visage ou une forme aux choses que nous ne comprenons pas. Au premier coup d’œil, l’image d’une forêt aux contours flous émerge de la forme et des motifs de GUMS (2024). Le balayage et le fondu des couleurs et des fils suspendus suggèrent un paysage liminal, quelque part entre l’éveil et le rêve, la mémoire et le présent. Nous sommes amenés à la lisière de la forêt où des dangers peuvent se cacher. En nous rappelant le titre de l’œuvre, nous découvrons la bouche reptilienne.

De même, MAW (2024) existe sur cette frontière incertaine entre formes abstraites et anthropomorphiques. Tapisserie suspendue dans des tons de bleu et de blanc fauve, elle ressemble, comme son nom l’indique, à une créature affamée et attendrissante, un oiseau au visage poilu, à la langue rose et au gosier béant. En bavant, il pourrait presque laisser une mare de salive dans son sillage.

"Gutter", 2024 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

"Heart Two Heart", 2024 de Caroline ACHAINTRE - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ART: CONCEPT © Photo Éric Simon

L’énergie séduisante du travail de Caroline Achaintre réside dans cette coexistence de différentes possibilités. Les motifs deviennent des figures, les cercles, les trous et les plis deviennent des yeux, des bouches ouvertes ou un nez. Il en résulte que nous ne voyons jamais qu’une seule chose. Et alors que nous pourrions penser que nous regardons simplement ces créatures hybrides, elles nous regardent aussi en retour. Elles nous révèlent à nous-mêmes et, ce faisant, elles nous montrent le monde à travers leurs yeux. C’est un monde où le mystère, le fétichisme, l’exagération et l’irrationnel sont la norme.

Connaître le monde, c’est connaître cette complexité et cette étrangeté. Dans les tapisseries tuftées à la main de Caroline Achaintre, cette ambiguïté est renforcée par la texture de la laine qui devient fourrure. Dans ses créations en céramique, les surfaces polies et émaillées ressemblent à des peaux de reptiles, à des cordes d’intestins enroulées et à des masques primitifs.

Ici, les titres impressionnistes des œuvres, tels que Gutter (2024), Hypnotic (2024) ou Prompter (2023), ajoutent d’autres couches de signification et suggèrent des pratiques archaïques, surréalistes et obscures. S’engager avec elles est une expérience intense et intime. Ils jettent un sort. Ils convoquent des choses : des idées, des images, d’autres mondes. D’autres êtres.

- Brian Cass, 2024 (traduit de l’anglais)

Galerie ART: CONCEPT

4, passage Sainte-Avoye

75003 Paris

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