Nicole EISENMAN « with, and, of, on Sculpture »
"Perpetual Motion Machine", 2019 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
Du 5 juin au 21 septembre 2024
En convoquant la citation au genre de la monographie d’artiste, l’exposition de Nicole Eisenman « with, and, of, on Sculpture » [avec, et, de, sur la sculpture] explore la pluralité de la pratique sculpturale de l’artiste. Bien qu’Eisenman travaille la peinture dans un atelier différent de celui dédié à la sculpture, les deux disciplines restent néanmoins étroitement liées. (La distinction concrète entre ces deux lieux pourrait se traduire en termes de « chaotique » et de « moins chaotique »).
Cette interrelation transparaît clairement dans ses dessins, qu’elle décrit ainsi : « Une ligne est sculpturale, la façon dont elle flotte dans l’espace de la page blanche. On regarde la représentation d’une dimension qui peut être perçue comme bidimensionnelle ou tridimensionnelle. »
"Drawing for Procession", 2018 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
"The Artist at Work", 2023 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
Certaines œuvres de cette exposition sont reliées par des connexions manifestes. Au rez-de-chaussée, deux figures issues de l’installation sculpturale monumentale « Procession » (2019), initialement présentée à l’occasion de la Whitney Biennial 2019, ressurgissent au premier étage sous la forme d’un dessin préparatoire de grand format. Toutefois, chaque pièce se détache de la relation qui l’unit à l’autre.
En bas, la sculpture heuristique, assemblage de détritus aux allures de grande dame juchée sur le dos de « Perpetual Motion Machine » (2019) résulte à la fois de l’environnement de l’atelier et des préoccupations techniques de l’installation. À l’étage, le « G*d-cat » de « Drawing for Procession » (2024) déleste l’œuvre de sa fonction pratique pour la définir comme une entité à part entière.
"Archangel (The Visitors)", 2024 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
Détail "Archangel (The Visitors)", 2024 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
"Untitled (Sculpture on a Foggy Lake)", 2023 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
D’autres pièces développent leur relation au fil du processus créatif. Les œuvres de la série « Shape Driven Heads » se forment par l’acte physique de peindre, où les associations formelles se développent les unes sur les autres : l’action déterminant la réaction. Cette méthode est également fréquente dans le travail sculptural d’Eisenman.
Par exemple, dans « Head with Slab and Foot » (2023), la figure émerge à la fois de matériaux trouvés dans l’atelier et d’éléments sculptés en réponse à ces derniers. Cette pièce pousse plus loin la recherche atour des échanges entre différentes dimensions en incorporant une plaque de plâtre imprimée en creux, fusionnant une image bidimensionnelle directement dans la chair d’un cartouche volumétrique confectionnée en correspondance à la structure tridimensionnelle.
"Shape Driven Head 2", 2024 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
"Mad Cat", 2024 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
Au cœur de l’exposition se trouve « Archangel (The Visitors) » (2024), une grande peinture composée de multiples strates dépeignant le vernissage d’une exposition imaginée de sculptures. Eisenman y peint à la fois des sculptures fictives et – ce qui aurait plu au XXème siècle – des corps en relation physique avec les formes dans l’espace. Une sculpture, quant à elle, non imaginaire, renvoie à l’« Archange prussien » (1920) de John Heartfield et Rudolf Schlichter, une silhouette militaire à tête de cochon exposée pour la première fois à la Première foire internationale Dada organisée à Berlin en 1920.
Eisenman « installe » la figure dans la partie supérieure du tableau, suspendue de manière inquiétante au-dessus de la scène. Le titre de l’œuvre, « The Visitors », reprend celui d’un single d’ABBA sorti en 1981, dont les paroles renvoient à la réalité des persécutions subies par les personnes dissidentes politiques. On pourrait également y lire une allusion aux nombreux personnages qui se pressent dans l’espace d’exposition, ou aux trois figures menaçantes situées au fond de la salle, ou encore à l’archange, réminiscence des visitations mystiques qui parcourent l’histoire de l’art.
"Sketch for Procession", 2018 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
"Sculpture Park ", 2023 de Nicole EISENMAN - Courtesy de l'artiste et de la Gallery HAUSER & WIRTH - Paris © Photo Éric Simon
La grande diversité de médiums réunis dans cette exposition témoigne peut-être le plus distinctement et le plus collectivement de la remarquable capacité d’Eisenman à la synthèse. En passant d’une matière à l’autre et d’une forme à l’autre, les dialogues entamés dans l’une se poursuivent et se transforment dans la suivante.
Ainsi, les distinctions entre les formes s’opèrent davantage sur un mode externe qu’interne, et dérivent de la pratique du langage. À l’interstice entre « peintre » et « sculptrice », le terme d’« artiste » est sans doute le plus approprié pour qualifier Nicole Eisenman.
Cette exposition est la première de l’artiste chez Hauser & Wirth Paris. La grande rétrospective « Nicole Eisenman: What Happened », organisée par le Museum Brandhorst et la Whitechapel Gallery à Londres, est actuellement visible au Museum of Contemporary Art Chicago jusqu’au 22 septembre 2024
Gallery HAUSER & WIRTH
26 bis rue François 1er
75008 Paris
Jours et horaires d’ouverture : Du mardi au samedi de 9h à 18h.