Dana SCHUTZ «The Sea and All Its Subjects»
"Glory", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
Du 14 octobre au 16 novembre 2024
David Zwirner a le plaisir de présenter une sélection de travaux récents de Dana Schutz dans sa galerie parisienne. Seconde exposition personnelle de l’artiste états-unienne avec la galerie, qui fait suite à Dana Schutz : Le monde visible, rétrospective d’envergure qui s’est tenue en 2023-2024 au musée d’Art moderne de Paris.
"Climber", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
The Sea and All Its Subjects (La Mer et ses sujets réunis) illustre le goût persistant de l’artiste pour la création de scénarios improbables fonctionnant également comme allégories visuelles particulièrement évocatrices. Le titre de l’exposition, d’une précision malicieuse, fournit à l’artiste un point de départ fécond, car l’exploration picturale d’un vaste et mystérieux univers, saynète après saynète, engendre une profusion d’interprétations potentielles qui invitent aux associations d’idées – à l’exemple du double sens de « sujet » (objet de ou exposé à) ou de l’homophonie, en anglais, entre sea (la mer) et to see (voir).
Exécutés alla prima, sans esquisse préparatoire ou séchage intermédiaire, les tableaux sont saturés de couleurs et, en un sens, d’humeurs et d’atmosphères. S’y presse aussi toute une galerie de personnages à la dérive, ballottés par des scénarios farfelus sinon impossibles et des conjonctures délicates sinon absurdes. Par leur richesse narrative et leur créativité formelle, ces œuvres récentes reflètent et prolongent le travail que Dana Schutz mène de longue date autour de la représentation de l’expérience subjective du monde, tout en mettant en lumière les plus profonds paradoxes de la condition humaine.
"The Optometriste", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
Plusieurs œuvres visibles dans l’exposition montrent des groupes de personnes aux prises avec des tâches ou des interactions qui semblent à la fois compliquées et futiles. The Optometrists (2024) dépeint ainsi des créatures cyclopéennes s’affairant à ramasser des objets plus ou moins sphériques, dont différents types de fruits, un ballon dégonflé, des œufs répandus au sol, etc.
Si l’on pense bien sûr à la mythologie grecque, ainsi qu’aux portraits de cyclopes du peintre symboliste Odilon Redon (1840-1916), les personnages de Dana Schutz semblent vouloir échanger leurs yeux, comme pour s’aider l’un et l’autre à retrouver la vue.
Dans Mourning an Octopus (2024), un groupe manipule la dépouille d’une pieuvre dans une salle de musée – est-ce pour l’y installer ou pour l’en sortir ?
Les tentacules de la créature se confondent avec le revêtement en terrazzo évoquant un ciel étoilé tombé au sol. À l’arrière-plan, quelques tableaux de styles et périodes variés rappellent ceux d’artistes tels que Vincent van Gogh, Frans Hals ou Giorgio de Chirico.
"Apples", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
Ailleurs dans l’exposition, ce sont des figures individuelles qui affrontent ou subissent des situations complexes voire inextricables. Comme cette femme assise dans un fauteuil high-tech qui, agissant comme une extension de son monde intérieur, déploie des sortes d’écrans transparents où sont projetées des images d’éléments naturels, représentés de manière stylisée ou, au contraire, avec un certain réalisme. Elle dégage une présence quasi mystique, impression renforcée par sa mimique ambiguë, à la fois triomphante et grave, et son collier en or, reprenant en amples lettres cursives le titre du tableau, Glory, à connotation religieuse.
Dans The Catch (2024), une idole représentant un homme à moitié avalé par un poisson semble gigantesque par rapport aux personnages qui la transportent à travers un terrain escarpé, d’immenses leurres de pêche pendant au-dessus de la scène. La figure hybride fait penser à un ondin pétrifié, amalgame formel et symbolique où corps humain et créature marine sont pris dans le même piège.
"The Catch", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
"Hiker", 2023 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
Représenter l’ambiguïté ou l’échec de certaines tentatives de communication se retrouve aussi au cœur de tableaux tels que The Medium (2024), où un groupe entoure une figure hiératique, apparemment sculptée dans l’argile, leurs burins et ciseaux jonchant le sol alentour. Elle paraît changer de forme plus vite que les efforts de modelage des sculpteurs et, à vrai dire, il est possible qu’ils ne fassent que l’aider à tenir à la verticale. D’autres protagonistes semblent interagir « à travers » la figure centrale, à la fois médiatique – reliant les humains – et médiumnique – reliant les mondes.
Dans The Patient (2024), un groupe s’efforce de transporter une femme souffrante au moyen d’un grand drap, et c’est comme si la toile elle-même portait son sujet. Dans cette scène, qui évoque aussi une procession religieuse ou festive, impossible d’assurer le confort ou même la bonne prise en charge du corps dégingandé de la patiente, qui menace de glisser hors du drap à tout instant.
"The Patient", 2024 de Dana SCHUTZ - Courtesy de l'artiste et de la Galerie David ZWIRNER - Paris © Photo Éric Simon
Dana Schutz (née en 1976) vit et travaille à New York. Peintre et sculptrice, elle construit ses œuvres comme autant de récits complexes et d’allégories visuelles qui mobilisent la capacité de l’art à représenter l’expérience subjective du monde. Peuplé de personnages plongés dans des situations impossibles, énigmatiques ou imaginaires, son travail explore et révèle toutes les difficultés, tensions et ambiguïtés de nos vies contemporaines.
Née à Livonia, dans l’État du Michigan, Dana Schutz est diplômée du Cleveland Institute of Art (Bachelor of Fine Arts) et de la Columbia University de New York (Master of Fine Arts).
Galerie David ZWIRNER
108 rue Vieille du Temple
Fr- 75003 Paris
Jours et horaires d’ouverture: du mardi au samedi de 10h à 17h.