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L'ACTUALITÉ DES EXPOSITIONS ET DES FOIRES INTERNATIONALES D'ART CONTEMPORAIN À PARIS ET EN ÎLE-DE-FRANCE. EXHIBITION IN PARIS

01 Nov

Lynn CHADWICK « HYPERCYCLE CHAPITRE I : SCALÈNE (1947-1962) »

Publié par Eric SIMON  - Catégories :  #Expo Sculpture Contemporaine

"Two Figures", 1954 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Two Figures", 1954 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Du 12 octobre au 16 novembre 2024

 

 

« Hypercycle », dont le commissariat est assuré par l’historien de l’art Matthieu Poirier, est une série d’expositions déployée sur trois continents et plusieurs sites, de 2024 à 2026, sous la forme de trois chapitres retraçant chacun une partie de la carrière de l’artiste.

 

Lynn Chadwick (1914-2003) fut l’un des artistes les plus marquants de la sculpture du XXe siècle, aux côtés d’Alberto Giacometti, Henry Moore et Louise Bourgeois. Le chapitre initial se tient à partir du 12 octobre 2024 à Paris, au Centre des monuments nationaux – Hôtel de Sully et à la galerie Perrotin. Il réunit une soixantaine d’œuvres-clefs réalisées entre 1947 et 1962, période à laquelle l’artiste définit sa singularité et accède à une consécration internationale.

 

C’est la première fois qu’un tel ensemble de Lynn Chadwick, dont les œuvres sont présentées dans près de 150 collections publiques de par le monde, est montré en France depuis l’exposition de l’artiste au musée national d'art moderne, à Paris, en 1957.

 

"Stabile with Mobile Elements", 1950 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Stabile with Mobile Elements", 1950 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Le deuxième chapitre, consacré aux œuvres de maturité, de 1963 à 1979, aura lieu à New York en 2025 et le troisième, dédié aux œuvres tardives, de 1980 à 1996, en Asie, en 2026. Une publication monographique, à paraître en 2025, synthétisera ce tour d’horizon et articulera divers points de vue sur l’œuvre.

 

 

Né en 1914, Lynn Chadwick se forme à Londres et, après un long séjour à Paris pour y apprendre le français, pratique le dessin architectural, le design mobilier et textile, avant de devenir pilote pour la Fleet Air Arm durant la Seconde Guerre mondiale. Il entame sa carrière artistique en 1947 avec une série de mobiles suspendus.  Fait rare à l’époque, cette modalité implique le mouvement physique, tout en privant la sculpture de sa masse et de ses appuis traditionnels.

 

Ces réalisations de Chadwick sont abstraites, mais déjà riches d’échos naturalistes. Autour de 1951-52, sa sculpture quitte le domaine aérien et, sans pour autant se soumettre à la force gravitaire, semble poser le pied, ou plutôt la pointe du pied, sur le sol ou des socles, parfois sous formes de stabiles articulés et manipulables, mais le plus souvent sous forme de « bêtes » énigmatiques et autres silhouettes humanoïdes et hiératiques, à la tête et aux membres atrophiés. Remarqué sur la scène internationale comme incarnant le renouveau de la sculpture britannique d’après-guerre, Lynn Chadwick reçoit rapidement de nombreuses distinctions, comme le grand prix international de sculpture à la Biennale de Venise, en 1956.

 

"Maquette II Inner Eye", 1952 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Maquette II Inner Eye", 1952 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Il déploie durant cette décennie un vocabulaire formel singulier, fondé sur une géométrie acérée de riches effets de matière et des masses portées par des appuis fins à l’apparence précaire, les commentateurs y voient alors une gravité existentialiste propre à une période où l’Angleterre et l’Europe se reconstruisent sur fond des traumas de la Seconde Guerre mondiale.

 

 

Affirmant que « l’art doit être la manifestation d’une force vitale surgie de l’obscurité », Chadwick s’inscrit alors, en tant que sculpteur et donc en biais, dans la logique picturale de l’automatisme, de l’art informel et de l’expressionnisme abstrait. À ses yeux, la sculpture doit être le fruit d’une approche instinctive et pragmatique, d’une croissance organique, non plus sur la toile, mais dans l’espace de la géométrie et du volume.

Prenant le contrepied des courbes souples de son prédécesseur Henry Moore, le jeune sculpteur regarde alors tant le constructiviste Naum Gabo que les réalisations inquiètes de Jacob Epstein ou celles, existentialistes, d’Alberto Giacometti.

 

"Beast VII", 1956 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Beast VII", 1956 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Nourri des découvertes récentes de l’architecture et fasciné par les travaux de Charles Darwin, il travaille alors sans répit aux implications sculpturales de l’exosquelette et de la carapace, insectes et autres tortues. En d’autres mots, il opère la remontée, à la surface, de ce que la sculpture dérobe habituellement au regard. Nombre de bronzes, issus de cette logique singulière évoquent des fossiles, écorchés ou privés de leur chair enveloppante ou encore, cette fois par leurs sections et leurs aplats géométriques, des formes allant de l’origami à l’armure médiévale.

 

Quittant Londres au milieu des années 1940, Chadwick installe son atelier dans les Cotswolds, où il acquiert en 1958 le château néo-gothique de Lypiatt et en transforme les espaces intérieurs, délabrés, en un white cube immaculé à même d’accueillir ses œuvres.

 

"Beast", 1955 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Beast", 1955 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Third Maquette for Teddy Boy and Girl II", 1956 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Third Maquette for Teddy Boy and Girl II", 1956 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Il instaure alors un lien profond et durable entre sa pratique et la nature environnante, ses arbres gigantesques, ses reliefs géographiques, sa faune et sa flore. Mêlant le vivant et l’architecture, cet environnement façonné par l’artiste-architecte devient à la fois un écrin et une source pour l’œuvre.

 

 

Ces premières années, cruciales, voient apparaître ses premiers motifs récurrents, qui traduisent l’attention que Chadwick porte à l’architecture moderniste, nottament à ses fines structures portantes en métal. Son influence est déjà palpable dans ses mobiles et ses premiers bronzes, entre 1951 et 1962, qui évoquent divers animaux fantastiques, des couples hiératiques à l’apparence d’insectes, des canidés et d’autres silhouettes facettées, toutes tendues par leurs arêtes saillantes. Car ces sculptures sont issues, dans leurs maquettes préparatoires ou models, de la soudure de tiges métalliques.

 

 

 

En résultent divers tétraèdres et autres dérivés de base triangulaire, dont l’artiste vient ensuite combler les vides par des petits blocs de pierre ou de charbon et, essentiellement, de la stolite, un mélange industriel de plâtre et de poudre de fer, pour ensuite en traiter les surfaces extérieures à l’aide de divers outils crantés, et créer de puissants effets de matière.

 

 

"Untitled", 1955 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Untitled", 1955 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Chadwick crée ses formes de façon instinctive, sans esquisse préparatoire, comme pour les faire s’animer d’une croissance organique propre. Ses créatures hybrides, de leur model ou maquette à leur tirage en bronze, jaillissent non pas du compas et de la règle, mais de la main de l’artiste et de son extension outillée : le chalumeau.

 

 

Ses dessins à l’encre, représentant ses sculptures, sont intégrés à cette double exposition parisienne. Ils sont remarquables par leur concision et leur vivacité, mais se voient toujours réalisés dans un second temps, après l’exécution, le plus souvent à des fins d’archivage ou de documentation.

 

"Encounter VII", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Encounter VII", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

L’œuvre de cette première période de l’artiste naît de la synthèse de plusieurs logiques. Chadwick explore alors le biomorphisme ainsi qu’une forme étrange d’hybridation entre l’humain, l’animal, le végétal, la mécanique, et l’architecture. Aussi le thème du couple, qui fait son apparition chez lui et qui sera prépondérant dans le reste de sa carrière, révèle à cette période une dualité androgyne, voire siamoise : au sein d’un duo, chaque figure se voit souvent reliée à l’autre par une excroissance généralement située au niveau de la taille.

 

 

Cette étrange symbiose organique s’applique également à certaines sculptures figurant un personnage ou un animal seul, qui semblent être, quand on les examine de près, un amalgame de deux corps distincts, la jonction de deux cages thoraciques.

 

"Maquette III Moon of Alabama", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Maquette III Moon of Alabama", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

Au IVe siècle av. JC., le philosophe platonicien Xénocrate, se penchant sur la symbolique des triangles, qualifiait d’« humain » le triangle scalène, aux côtés de longueurs inégales – l’équilatéral étant « divin » et l’isocèle, « diabolique ». Cette figure géométrique, à la fois élémentaire et habitée par le mouvement nous paraît, concrètement et métaphoriquement, former le noyau génétique de l’œuvre de Lynn Chadwick et préciser son humanisme.

 

 

Sous ses extensions modulaires et spatiales que sont le tétraèdre et ses dérivés, ce module irrégulier, et par là-même porteur d’instabilité et d’énergie, sous-tend la vitalité hiératique – un oxymore qui parcourra ensuite l’œuvre tout entier, rappelant incidemment que les scalènes sont également les muscles saillants du cou, responsables de l’articulation tête-corps et de la dynamique posturales – sujet nodal de la sculpture classique, s’il en est.

 

"Skyscraper", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Skyscraper", 1957 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Bullfrog", 1951 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

"Bullfrog", 1951 de Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN © Photo Éric Simon

À cette période séminale de l’œuvre, l’esprit de la géométrie relève chez Chadwick du constructivisme et de l’architecture moderniste.

 

Cet esprit s’incarne à proprement parler dans le corps matériel de la sculpture, et retourne vers le vivant et la réalité naturelle, dont la géométrie même fut initialement déduite. Ainsi, les créatures profondément hybrides et mystérieuses peuplant les extérieurs grandioses de l’hôtel de Sully et les intérieurs épurés de la galerie Perrotin nous renvoient, par leur énergie contenue et leur précarité apparente à notre propre condition de spectateurs, à l’instar des têtes Moaï de l’île de Pâques ou des antiques canidés sculptés de l’île de Délos, gardiens et témoins éternels de l’humanité, qui passionnaient le sculpteur britannique.

 

- Matthieu Poirier, Historien de l’art

 

Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN

Lynn CHADWICK - Courtesy de l'artiste et de la Galerie PERROTIN

Lynn Chadwick est né en 1914 à Barnes, Royaume-Uni et décédé en 2003 à Gloucestershire, Royaume-Uni.  Les sculptures figuratives angulaires de Lynn Chadwick ont ouvert la voie à de nouvelles approches de la sculpture au milieu du XXe siècle.

 

 

Chadwick a rompu avec les méthodes traditionnelles de sculpture en bois ou en pierre, en soudant du fer et du bronze pour créer des figures expressionnistes et géométriques qu'il a conçues à la volée plutôt que de travailler à partir de plans préétablis. Si ses sculptures représentent souvent des formes humaines ou biomorphiques, elles peuvent aussi osciller à la limite de l'abstraction.

 

 

Chadwick a participé à la Biennale de Venise en 1956, où il a remporté le prix international de sculpture. Ses œuvres ont été exposées à New York, Londres, Berlin, Paris, Hong Kong, Milan, Tokyo et Los Angeles.

En 2003, l'année de la mort de l'artiste, la Tate Britain a organisé une grande rétrospective de Chadwick. Ses sculptures font partie des collections du musée Rodin, de l'Art Institute of Chicago, du Philadelphia Musuem of Art et de la Royal Academy of Arts.

 

 

Galerie PERROTIN

76 rue de Turenne

75003 Paris

France

 

 

 

https://www.perrotin.com/

 

 

 

Jours et horaires d’ouverture : du mardi au samedi de 11h à 19h.

 

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