Expo Peinture Contemporaine: David Salle/Francis Picabia
Du 23 janvier au 23 février 2013
David Salle vit et travaille à New York. Il est né en 1952 à Norman (Oklahoma). Après avoir étudié au California Institute of the Arts dans les années 70 avec John Baldessari il est devenu, dès les années 80, l’un des protagonistes de la peinture figurative de la scène New Yorkaise.
La Galerie Thaddaeus Ropac est très heureuse de présenter la nouvelle exposition David Salle/Francis Picabia, qui se veut un dialogue fort entre les nouvelles peintures de l’artiste américain et une sélection d’œuvres de Picabia (1879-1953). Les critiques ont très souvent rapproché leurs œuvres en s’arrêtant particulièrement sur leur tendance à superposer les images dans un jeu de démultiplication sémantique. Ce que l’on ignore souvent est que David Salle ne se réclame pas spécifiquement de cet héritage car selon lui :
« Mon travail a été associé avec ses œuvres intitulées «transparence» — mais, tandis que je les aime beaucoup, ce ne sont pas les œuvres qui m’ont particulièrement influencé ».
Francis Picabia a connu une carrière artistique kaléidoscopique d’expériences sans jamais vouloir adhérer explicitement à aucun courant. Il apparaît en grand défendeur de la liberté en art et c’est précisément cet amour pour la liberté qui rapproche David Salle de son aîné : « Mon attirance pour Picabia relève plus de son esprit et pas particulièrement de son style. La première fois que j’ai vu ses peintures des années 30 et 40, j’ai senti que je n’avais pas de « direction » quant à la façon de les regarder. (….) J’ai trouvé cette attitude libératrice et excitante, libre de bonnes intentions — une véritable anarchie! »
Picabia, peintre et poète, se joue alors de tout et de tous. Ses peintures et dessins comme Manga (1932-33) et Mélibée (1932-33), recourent au procédé de la superposition et évoquent des images à la limite du rêve où l’histoire de l’art cohabite avec la littérature, le fantasme, les bergers et les Madones, l’Antique et les portraits plus ou moins fantasmés, idéalisés ou contemporains. Epris de liberté, il remue plus tard les codes de la peinture traditionnelle et bourgeoise en recourant aux images de charme : La chienne de Baskerville, (1932-33), la Femme au bouquet (1942). Ce sont précisément ces nombreux points qui évoqueront de premier abord un lien avec l’œuvre du peintre américain.
David Salle est un artiste majeur qui a insufflé dès les années 80 un nouveau langage conceptuel dans la peinture. Ses compositions de grand format surprennent par les associations hétérogènes et parfois contradictoires, rassemblées dans des tableaux de deux ou trois toiles. Les éléments qu’il combine sont issues de la culture populaire, du Pop Art, d’un vocabulaire décoratif, géométrique ou figuratif qui se juxtaposent, se greffent les uns aux autres. Telle une équation mathématique complexe, les sens et la force de ces éléments se multiplient, s’additionnent et se divisent d’une manière étrange et hybride, révélatrice de notre époque marquée par d’incessantes sollicitations visuelles.
Dans l’exposition de la Galerie Thaddaeus Ropac, David Salle se projette en faiseur d’images utilisant des motifs animaliers, des caricatures humaines, ambiguës et étranges mais aussi des corps féminins dans des postures suggérant la séduction. Ces images peintes en noire et blanc, légèrement décolorées et aux contours contrastés semblent évoquer un clair obscur caravagesque. Ces motifs ne sont ni des appropriations ni des images trouvées. Ce sont des images conçues telles des mises en scène, traduites en peinture. La grande tradition de la peinture est d’ailleurs convoquée par la citation des noms de maîtres tels que Poussin et Watteau, lettrage qui constitue une mise en abyme du mode de fonctionnement de l’image en tant que signe à la façon d’Ed Ruscha. L’élément supérieur est occupé par des sérigraphies de photos de détritus qu’il a trouvé sur les plages. Ces motifs de branchages à l’allure expressionniste sont les seuls éléments « trouvés » de ses compositions. Il aime faire coexister les matières en juxtaposant également la toile contre le métal, la sérigraphie contre la peinture et en donnant au tableau son propre rythme comme les rimes d’une poésie, ce qui rappelle évidemment l’œuvre de Sigmar Polke, un artiste particulièrement fasciné par Picabia.
Autant la qualité et la nature du langage picturale de David Salle était en phase avec la culture ambiante des années 80, autant aujourd’hui David Salle cherche au travers de ces collisions de motifs une émotion, une manière de libérer son regard, donnant au tableau sa pleine autonomie, source d’émotion sans équivalent pour l’artiste.
Si les œuvres de ces deux peintres ont en commun cette libération de l’esprit par le choc des images, la peinture de David Salle se détache peut être par la cohérence et la grande rigueur du
langage mis en place. Les deux maîtres se rejoignent cependant dans la démonstration que le sens de l’image est une affaire de perception et que l’œil est un instrument de liberté.
7, rue Debelleyme
75003 Paris