Maurizio CATTELAN: frondeur du paradoxe, provocateur à l'humour féroce
Comme beaucoup d'artistes contemporains, c'est l'attitude de Cattelan qui décrit le mieux son œuvre, plutôt que le type de médium qu'il utilise. D'un esprit frondeur, il pratique le paradoxe, la provocation, l'humour et l'ironie féroce — son esprit frondeur a retenu les leçons de ses maîtres, Pablo Picasso pour la culture du star-système et Andy Warhol pour son génie médiatique.
Cattelan cherche en permanence à tourner en dérision l'art, son idéalisme et sa stupidité et, en particulier, le monde de l'art contemporain. Il en critique la production artistique – une toile entaillée du Z de Zorro devenant, par exemple, une référence dérisoire au travail de Lucio Fontana – et le milieu des artistes. C'est là tout le paradoxe de Cattelan, car il aime se faire passer pour un artiste en marge du marché de l'Art, alors qu'il en est en fait un acteur majeur, par exemple en tant que commissaire de la biennale de Berlin.
L.O.V.E.
Pour accentuer sa critique, Cattelan n'hésite pas à ouvrir sa propre galerie new-yorkaise (la « wrong gallery »), galerie où rien ne se vend et qui est de toute façon fermée en permanence par simple contestation. Lorsqu'il ne veut pas se déplacer lui-même pour répondre, même de façon lapidaire, aux interviews, il n'hésite pas à envoyer son assistant et compère Massimiliano Gioni à sa place — une journaliste du New York Times s'est fait piéger.
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Cattelan crée des œuvres mémorables qui font toujours scandale et donnent lieu à toutes sortes d'interprétations, jusqu'à mettre en cause la religion et le sacré, comme La Nona Ora, sculpture qui représente une effigie, en cire et grandeur nature, du défunt pape Jean-Paul II terrassé par une météorite.
Mais c'est malgré lui que ses œuvres deviennent des stars du marché. Il n'apprécia d'ailleurs pas la revente de La Nona Ora par son collectionneur ; pour illustrer son mécontentement, il scotcha ni plus ni moins son galeriste au mur (Massimo De Carlo) afin qu'il se vende lui-même.
Une météorite, un don du ciel peut-être
Ave Maria
Il ne fabrique jamais ses pièces et utilise parfois des acteurs pour ses performances. En 1994, il persuade le célèbre galeriste Emmanuel Perrotin de passer un mois déguisé en lapin rose et pénis marchant, Errotin le Vrai Lapin. À une autre occasion, il fait pédaler sur place les gardiens du musée où on lui demande d'exposer.
Cattelan base donc son art sur le tragique, le drôle mais, surtout, la provocation. Il veut marquer les esprits, à tel point que des accidents se sont déjà produits ; à Milan, sur la place du 24-Mai, où il avait pendu trois mannequins d'enfants à un chêne, un homme outré s'est fendu le crâne en voulant décrocher ces sculptures. L'œuvre a été retirée — mais l'incident a été largement popularisé par le journal télévisé — et continue d'exister à travers les documents d'actualité de l'époque.