Jenny SAVILLE : "les anatomies de l'ame ou l'aventure de l'intime"
Jenny Saville est une artiste peintre contemporaine anglaise née en 1970, elle a été révélée en 1992 dans le mouvement des Young British Artists, soutenu par Saatchi. Les corps qu’elle représente nous racontent une histoire, ils sont des livres ouverts, des anatomies profondément graphiques. Sur ces visages, il nous arrive de lire l’ennui, la tristesse, la provocation, la fierté…
Ces modèles ne sont jamais ceux que la société nous prescrit ; ils sont imparfait, parfois hors
norme, ils nous ressemblent, nous indiffèrent, nous dégoûtent peut être, nous émeuvent, nous blessent… Il reflète une créature humaine très contemporaine, isolée et en mal d’affection, tourmenté
par les obligations corporelles de la société actuelle. Malgré tout, ces corps ne sont pas vaincus, il s’affirme et renvoie des formes et des couleurs aux yeux de ceux qui les épient dans la rue
comme devant la toile, ils sont poétiques et peuvent évoquer des souvenirs au voyeur que nous sommes.
Nous ne pouvons pas dire que ces tableaux sont un reflet mais ils nous renvoient à chaque fois à un des multiples spectres qui habitent nos corps. Oui, les peintures de l’artiste anglaise sont sensuelles de part le rapport qui se crée entre le modèle et le spectateur. Jenny Saville s’aventure dans l’intime ; sans vraiment devenir exhibitionniste, elle arrive à suggérer les pensées personnelles de ces modèles aux lecteurs/spectateurs qui ressentent les oeuvres plus qu’ils ne les contemplent.
La chair est omniprésente dans l’œuvre de Saville, opulente et monstrueuse, elle se répand à la manière d’une peinture épaisse que l’on déverserait sur la toile et qui s’étalerait lentement. Pourtant cette peau étendue par la graisse donne des formes inédites aux corps, lui donne de la consistance, de la matière et du charme.
Il s’agit donc d’un geste picturale critique qui déplore cette interdiction d’être à l’image et cette exclusion des désirs d’autrui, mais affirme
aussi la puissance de la singularité ainsi que la beauté de la différence et du particulier. Les mots qui viennent à l'esprit sont grotesque, monstrueux; bien sûr, cela remet en question le
regard de l'homme sur le corps des femmes, la notion de Beau et son importance. Jenny Saville se réfère à de Kooning, qui, lui aussi traitait les corps de femmes en peinture avec violence et
acharnement.