Exposition Peinture Contemporaine: Alex KATZ « Red Dancers »
Du 20 juin au 18 juillet 2019
“Ce sont les gestes qui m’intéressent, et ils sont au coeur même de la danse.”
Alex Katz
La Galerie Thaddaeus Ropac est heureuse de présenter une exposition de nouvelles peintures et d’œuvres sur papier d'Alex Katz rassemblées autour du thème commun de la danse. Depuis les années 1960, le peintre américain n’a cessé de puiser son inspiration dans cet art, influencé par sa collaboration pérenne avec le danseur et chorégraphe Paul Taylor (1930-2018). Tout en travaillant pendant plus de trente ans sur les décors et costumes des performances de Taylor, Katz a développé un corpus original, prenant des danseurs pour modèles afin d’explorer l'immédiateté du geste et du mouvement par le biais de la peinture.
Dans ce nouvel ensemble de portraits, Katz magnifie le mouvement en repoussant radicalement les limites du cadrage qui caractérise son style unique, isolant des parties du corps fixées dans un mouvement arrêté. Ce format original, inspiré des techniques employées par la télévision et le cinéma hollywoodien, est utilisé par l'artiste pour donner à l’image picturale un effet des plus saisissants.
Selon son ami, le poète Frank O'Hara (1926-1966) : « La découverte à la télévision, sur un panneau d'affichage ou dans un film d’une image en gros plan a fourni à Katz les moyens d'isoler et d'abstraire chaque élément distinct, comme s'il s’agissait d’un arc, d’un parallélogramme, d’une ellipse, au sein de l'unité psychologique que le public confère à une forme identifiable. » L'utilisation prédominante de la couleur rouge confère à ces nouveaux tableaux une intensité particulière, mettant en contraste la luminosité et le dynamisme de la figure du danseur, exécutée avec vivacité à coups de pinceau rapides sur un fond monochrome.
Dans une interview donnée récemment à propos de cette série, Katz revient sur l'importance de la danse et du mouvement dans son travail : " Ce sont les gestes qui m'intéressent et ils constituent le cœur même de la danse. Paul [Taylor] a beaucoup étudié l’histoire de l'art, cela se voit dans ses premières pièces.
Il y a d’abord une longue tradition de gestes, puis l’on s’est mis en mouvement ; une caméra peut attraper quelque chose mais en général elle ne capte pas mouvement réel. Vous pouvez seulement rendre la réalité du mouvement quand vous le manipulez, à la manière dont Rubens donne du mouvement à ses personnages. C'est donc devenu l'une des choses qui m'intéressait.”
Depuis le début des années 1950, Alex Katz a développé un style 'réaliste moderne' personnel, à cheval entre abstraction et figuration pop. L'apparente simplicité et la planéité affirmée de son style pictural ont, à bien des égards, anticipé le Pop Art, une étiquette que Katz a pourtant souvent rejetée, se définissant avant tout comme un peintre de « l’instant », indépendamment de tout mouvement: "
Le Pop Art traite des signes, alors que mon travail traite des symboles. Le Pop Art est cynique et ironique. Mon travail ne l'est pas. Ce sont là de grandes différences. Le Pop Art est moderne. Mon travail s’inscrit dans la tradition. » Katz est un peintre qui a toujours échappé aux catégories faciles et a toujours cherché à capter, de son style clair et vif, l’impression fugace de ce qu'il nomme le " présent immédiat ".
Le fond rouge des toiles présentées dans l’exposition rappelle celui de l'une de ses premières peintures, le célèbre Red Smile (1963, Whitney Museum of American Art, New York), portrait monumental d'Ada, sa femme et sa muse. Dans ce tableau d’où se dégage un fort sentiment de séduction, le rouge à lèvres qui souligne le sourire d’Ada se détache sur une surface monochrome elle-même rouge.
L’utilisation de cette couleur est un hommage au peintre abstrait Barnett Newman en particulier à son utilisation all-over du rouge dans son œuvre majeure Vir Heroicus Sublimis (1950-51, The Museum of Modern Art, New York). Se remémorant le processus de création de cette oeuvre, Katz se souvient d'avoir d'abord essayé de peindre le fond en gris avant de le remplacer par un rouge magenta et d’avoir choisi cette couleur pour sa plus grande puissance formelle et sa capacité à dessiner clairement le profil d'Ada.
Plus de 50 ans plus tard, Katz utilise un effet pictural similaire dans cette nouvelle série, se servant de la couleur rouge pour accentuer la sensation de mouvement, que l'artiste décrit comme "la sensation immédiate que l’on perçoit avant de concentrer son attention.” La dimension des œuvres, associée au cadrage de l'image et à sa surface homogène, donne l’impression d’une présence accrue du danseur : "Lorsque vous assistez à un spectacle de danse dans le public, de là où vous êtes la silhouette semble faire 4 cm de haut. Si le danseur est très doué, le spectacle devient alors grandeur nature. Il ne s’agit plus alors d’une figure de 4 cm mais d’une expérience immersive.
Ce qui constitue la dimension réelle d’une expérience se trouve dans notre esprit. L'essentiel, c'est donc le mouvement. Par le cadrage d’une image, vous pouvez bien davantage traduire le sentiment réel d'une performance que par une photographie où les personnes font 3 cm de haut.
Artiste engagé depuis longtemps dans un dialogue avec la peinture moderne, Katz a souvent exprimé son admiration pour les œuvres d'Henri Matisse, leur sens de la couleur, leur composition et leur économie de moyens. Impossible de ne pas penser ici au cycle de peintures sur la danse, dans lesquelles Matisse exprime un sens radical du mouvement et un sentiment paradoxal d'harmonie et de distorsion, ainsi qu’à ses fameux papiers découpés, technique à laquelle Katz a sans cesse recours pour inventer de nouvelles façons d'aborder le genre du portrait.
Dans la galerie du premier étage est exposée une sélection d’œuvres sur papier qui révèlent à la fois l'inspiration initiale et le processus par lequel l'artiste transforme une image brute en une œuvre accomplie. En général, Katz commence par un dessin exécuté rapidement au crayon ou au stylo et parfois par une esquisse à l'huile qui définit le motif. Il élabore ensuite un dessin de grand format plus abouti à partir de cette idée initiale qu’il fixe ensuite sur la toile préalablement préparée et qu’il perce à l’aide d’un outil (selon une technique de transfert originellement inventée pour réaliser les fresques à la Renaissance) afin de tracer le contour du motif à la surface de la toile. Merveilleusement évocatrices, les esquisses exposées ici témoignent du cheminement de l'artiste sur les questions de perspective, d’échelle, d’angle et de couleur.
Alex Katz, né en 1927 à Brooklyn, New York, est sans conteste l’une des figures du pop art. Il vit et travaille aujourd’hui entre New York et Lincolnville (Maine). Dans ses œuvres figuratives, Alex Katz s’est toujours placé à la frontière entre réalisme et abstraction. Il s’est établi comme peintre figuratif à l’heure où tous les peintres américains se détournaient complètement de la représentation. A cette époque, Katz a pris le contrepied de peintres comme Jackson Pollock, obsédé par l’impulsivité de son propre style ou par l’étude de différences à peine perceptibles, avec son traitement apaisé d’un monde clairement visible et serein.
Depuis les années 80, il est la figure de proue du Cool Painting, et l’un des peintres les plus influents sur la scène internationale. Il est aujourd’hui une icône pour toute une génération de peintres, âgée aujourd’hui entre 30 et 40 ans. Bien avant les papes du pop art tels que Andy Warhol, Katz a travaillé par séries, un principe repris cette même génération.
L’œuvre de Katz reste néanmoins indissociable de l’histoire de la peinture américaine, et notamment de Georgia O'Keeffe, Fairfield Porter, Ralston Crawford et Edward Hopper.
Galerie Thaddaeus Ropac
7 rue Debelleyme
75003 Paris
France
Jours et horaire d’ouverture : du mardi au samedi de 10h à 19h.