06 Oct

Amanda WALL « Beddy Bye »

Publié par Eric SIMON - Catégories : #Expo Peinture Contemporaine

"Other Me", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

Du 12 septembre au 11 octobre, 2025

Almine Rech Paris, Matignon a le plaisir de présenter 'Beddy Bye', cinquième exposition d'Amanda Wall. Dans « Portraits et Répétition » (1935), Gertrude Stein, célèbre poète et autrice avant-gardiste, s’exclame : « Rien ne change de génération en génération sinon la chose vue et cela fait une composition... Ce qui importe, c’est la manière dont les portraits des hommes, des femmes et des enfants sont écrits, et par écrits, j’entends créés. Et par créés, j’entends ressentis. »

Dans ce texte, publié à l’origine dans le cadre des Lectures en Amérique, en défense de son utilisation critiquée de la répétition dans ses portraits littéraires d’artistes, Stein défend la distinction entre répétition et insistance (ou emphase) et affirme que ses répétitions sont légèrement différentes à chaque fois. Grâce à ce processus de modification des répétitions, nous accédons à une compréhension plus en profondeur les sujets de Stein. Dans ces variations minimes, parfois presque imperceptibles, le sujet est capturé sous un angle différent.

"Beddy Bye", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

Aujourd’hui, dans un monde fortement médiatisé par les images numériques, la notion de superposition d’un sujet (et de sa fragmentation ultérieure) reste un concept incroyablement puissant pour construire un modèle ou soi-même. À travers ses peintures, Amanda Wall aborde la question du portrait pour sa génération, en imaginant des compositions cernées par le cadre d’un écran ou le souvenir de sujets vus ou documentés par des moyens numériques. Ces études picturales de la forme recèlent une réflexion sur l’existentialisme et l’isolement provoqués par notre ère numérique.

Cependant, sa touche n’est ni numérique ni froide ; il s’agit plutôt d’une diversité sensuelle de figures qui s’entremêlent et se transforment en nouvelles formes, marquées par des couleurs vives et des éclairs de lumière en forme d’étoiles et de papillons – une mûre compilation de la jeunesse.

"Light Slepper", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

"Anon", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

"Blue light", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

Dans 'Beddy Bye,' Wall présente une nouvelle série de peintures réalisées depuis le point de vue d’une personne allongée dans son lit ou de personnages ou d’objets blottis les uns contre les autres sous les draps : un groupe de garçons dont les visages sont collés les uns aux autres, des piles de filles qui se caressent et s’enchevêtrent, des cerises entrelacées avec des câbles et des douilles qui, à première vue, pourraient être confondues avec des rouges à lèvres, ce que Wall a qualifié sur Zoom de « nature morte par excellence ».

C’est la première fois que ses peintures représentent plusieurs personnages, même si elle explique qu’elle « ne les considère pas nécessairement comme des personnes différentes. Il s’agit plutôt de l’idée d’un moi fragmenté dans cet espace de réalité fracturé ». Les sujets sont également imaginaires, ou du moins non spécifiques : personnages issus de la mémoire de Wall, un amalgame d’amis, de figures vues en ligne, de photos sur Instagram et de sa propre image dans des miroirs, des pellicules photo et ses souvenirs.

"Bullet", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

"Black Cherry", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

Nos souvenirs actuels étant soumis à des visions fréquentes d’écrans, ils sont souvent formattés par les cadres d’un appareil photo ou une application. La dimension numérique atténue notre perception de la dimension corporelle. Notre cadre s’est déplacé à travers un viseur numérique. Dans le tableau qui donne son titre à l’exposition, les personnages se fondent les uns dans les autres, la figure de droite semblant émerger de la toile et tomber dans chaque figure successive dans un enchevêtrement de membres et de cheveux qui s’entremêlent au centre.

Le sentiment qui en résulte rappelle le défilement rapide d’une série de photos sur un téléphone ou le résultat d’une image produite par des commandes d’IA, des actions à la fois profondément ancrées dans la réalité actuelle et dissociées du monde physique.

"Nocturne", 2025 de Amanda WALL - Courtesy de l'artiste et de la Galerie ALMINE RECH © Photo Éric SIMON

Pour Wall, comme pour beaucoup, le lit est un refuge où l’on peut se retirer du monde et se confronter à soi-même. La présence de plusieurs personnages représente une série de répétitions avec des accents différents, un exercice d’imagination de multiples fragments ou formes d’une seule identité, un processus de métamorphose continu.

Cependant, Wall appartient également à une génération où les paysages de nos vies privées et publiques sont irrévocablement entremêlés. Jamais auparavant autant de personnes n’avaient travaillé à domicile, voire depuis leur lit, transformant ainsi cet espace de repos et de sexualité en un lieu potentiellement productif. En centrant cette exposition autour du lit, Wall place ses modèles ou avatars dans le paysage le plus complexe qui soit pour mettre en scène la rencontre entre le physique et le numérique.

- Sam Ozer, curatrice et écrivaine.

Galerie ALMINE RECH

18 avenue Matignon

75008 Paris FR

https://www.alminerech.com/

Jours et horaires d’ouverture : du mardi au samedi de 10h à 18h.

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