Exposition Duo Show: Eugène LEROY et SARKIS « Intérieurs »
Du 12 janvier au 17 mars 2018
La Galerie Nathalie Obadia est très heureuse de présenter Intérieurs, la troisième exposition personnelle de Sarkis à Paris, après Il Grido en 2016 à la galerie de Bruxelles. En invitant le peintre Eugène Leroy (1910-2000) dans un accrochage qu’il a conçu et mis en scène, Sarkis confronte son travail à celui du maître dont il considère l’oeuvre comme absolument indispen- sable.
Si l’oeuvre d’Eugène Leroy a bénéficié d’une attention croissante ces 20 dernières années auprès de la scène contemporaine internationale, Sarkis déplore que le génie du peintre ne soit pas encore reconnu sans détours comme l’une des figures artistiques les plus importantes du XXème siècle.
"2017.12 5X2 Cercles Aquarelles rouges recto verso", 2017 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
Déjà en 2012, dans l’exposition rétrospective Hôtel Sarkis que le MAMCO à Genève consacrait à Sarkis, l’artiste convoquait près de 70 artistes (architectes, écrivains, cinéastes, peintres, compositeurs) parmi lesquels John Cage, Andreï Tarkovski, Joseph Beuys, Edvard Munch, Sergueï Paradjanov, Arnold Schönberg ou Matthias Grünewald.
Ces «collaborations» faisaient alors fi de la distance qui isolait chaque oeuvre dans un temps et un espace cloisonné, pour favoriser des mises en dialogue au présent à comprendre comme des «inspirations revendiquées et amitiés célébrées».
Aussi complexe que le corps d’un tableau d’Eugène Leroy, l’exposition présente ici un ensemble d’une quarantaine d’oeuvres et a véritablement été pensée comme un intérieur - un banc, des étagères et des verres d’eau sont disposés dans chaque pièce de la galerie.
"2016.07.12 d'après Lega, Congo", 2016 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
L’exposition évoque d’abord la notion d’accumulation qui se manifeste diversement chez les deux artistes. Chez Eugène Leroy elle émerge de la géologie de la matière qui s’accumule sur la toile, évoquant le corps du peintre qui sculpte la densité de la peinture à l’huile et fait surgir les figures représentées.
C’est toujours cette même matière, sans corps étranger invasif, sans farces et sans manières qui se donne à voir complètement, comme agrégat signifiant. Véritables trésors, comme de grandes Ikones où toute la matière constitutive est nécessaire, ces peintures jalonnent l’espace comme des bornes, des repères sensoriels dans l’accrochage de Sarkis.
Fusionnant les héritages les plus divers, de Rembrandt à Malevitch, de Giorgione à Mondrian en passant par Jean Fautrier et Vincent Van Gogh, Eugène Leroy explore les multiples possibilités de la matière, avec le déploiement d’une science des empâtements qui confère un relief incomparable à ses peintures.
"2015.04.La maille et la robe Tsumori Chisato portées avec 2 tubes de cuivre", 2015 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
"Leidschatz (caisse en or)", 1992 - 2007 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
Détail "Leidschatz (caisse en or)", 1992 - 2007 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
Point de digressions non plus dans l’accumulation d’oeuvres aux techniques différentes dans l’oeuvre de Sarkis. Le Film N°171 «pour Eugène Leroy» est réalisé sans montage, tandis que les huiles sur papier laissent croître sous nos yeux la tâche d’huile qui s’imprègne, modifiant progressivement l’aspect et la couleur, façonnant l’oeuvre sans notion d’une quelconque durée déterminée.
Point d’artifices non plus ni de systématismes, tout est simplement à découvert avec bienveil- lance et une certaine quiétude, dans la multiplicité des médias que l’artiste emploie dans Intérieurs ; notamment avec des vitraux touchés, du bois doré à la feuille et des bandes magné- tiques, des néons, des céramiques en Kintsugis, des impressions sur papier, une image extraite du film de Volker Schlöndorff «Les désarrois de l’élève Torless», une vidéo comme un tableau et de la musique d’Anton Webern, du cuivre, de l’aquarelle séchée, un rouleau de papier bulle et des palettes en bois, du rouge à lèvres, du goudron noir et du tulle rose, une pierre fossilisée de 150 millions d’années et un témoin des fréquences cardiaques de l’artiste, un séchoir à dessin en métal, un pupitre et deux cadres Art Nouveau avec miroirs, une tunique de la styliste japonaise Tsumori Chisato et une côte de maille, des huiles parfumées et de la porcelaine, un masque africain, du riz, des plans de monastères et églises arméniennes du VIIIème au XIIème siècle, de l’aquarelle et des petites Ikones.
Alchimistes dans l’antre de leurs ateliers, lieux de repli, de recharge, de concentration (Sarkis reproduit d’ailleurs ici celui d’Eugène Leroy), les deux artistes portent une attention décisive à la perception de la lumière, comme clé de voûte de leurs représentations. Si les contours semblent niés en peinture par Eugène Leroy pour mieux forcer l’attention de celui qui est volontaire pour regarder, pour voir ; Sarkis met en oeuvre des passerelles entre différentes temporalités, différentes cultures et différentes sensibilités, des mises en scène protéiformes qui se nourris- sent de références pour construire un pont entre les oeuvres du passé et le monde contem- porain.
Chacune à sa manière, ces oeuvres témoignent de profonds humanismes qui se révèlent - en ces périodes troubles, remarquablement nécessaires.
"2016.09.05 d'après le masque Japon", 2016 de SARKIS - Courtesy Galerie Nathalie OBADIA © Photo Éric Simon
Eugène Leroy est né à Tourcoing en 1910 et décédé en 2000 à Wasquehal.
Malgré ses participations remarquées à la Biennale de Sao Paulo en 1990 et à la Documenta de Kassel en 1992, son oeuvre reste longtemps méconnue en raison de sa singularité. Elle fait l’objet d’une véritable relecture depuis le début des années 2000 de la part des institutions, du marché, et d’une nouvelle génération d’artistes, aux premiers rangs desquels se trouve le peintre allemand Georg Baselitz qui contribue à la nouvelle reconnaissance de son oeuvre.
Né en 1910, Eugène Leroy consacre tout son temps libre à l’exercice du dessin et de la peinture et découvre la peinture à l’huile en 1927 qu’il définira comme « l’accès à une volonté de bonheur». Il poursuit cette «quête de la peinture» au quotidien dans son atelier, entame en 1931 de courtes études à l’école des Beaux-Arts de Lille qu’il continue ensuite à Paris. Il se marie en 1933 et s’installe en 1935 près de Roubaix où il enseigne le grec et le latin, parallèlement à sa carrière de peintre.
Né en 1938 à Istanbul, Turquie, Sarkis vit et travaille à Paris depuis 1964.
Sarkis étudie le français, la peinture et l’architecture intérieure avant de s’installer à Paris en 1964. En 1967, il remporte le prix de peinture de la Biennale de Paris.
La même année au Salon de Mai, Sarkis présente Connaissez-vous Joseph Beuys ?
référence à l’artiste allemand qu’il considère comme le plus important de son époque. En 1969, il est invité par le critique Harald Szeemann à participer à l’exposition désormais célèbre Quand les attitudes deviennent formes à la Kunsthalle de Bern.
La transmission et l’enseignement sont également au coeur de ses préoccupations. De 1980 à 1990, il dirige le département Art de l’École des arts décoratifs de Strasbourg et de 1988 à 1995, il devient directeur du séminaire à l’Institut des hautes études en arts plastiques créé par Pontus Hulten.
Curateur de l’exposition SARKIS
Galerie Nathalie OBADIA
3 rue du Cloître Saint-Merri
75004 - Paris – France
Jours et horaires d’ouverture du mardi au samedi de 11h à 19h.