Joël-Peter Witkin: "Apôtre de la désagréable Beauté"
Joël-Peter Witkin est né le 13 septembre 1939 à Brooklyn (New York). Actuellement il vit et travaille à Albuquerque (Nouveau Mexique).
A l'age de 6 ans, il assiste avec sa mère et son frère à un carambolage impliquant plusieurs véhicules à Brooklyn. " De l'ombre des véhicules retournés, a roulé vers moi ce que j'ai pris pour un ballon, mais comme il roulait plus près et finissait par s'arrêter contre le trottoir où je me trouvais , j'ai pu voir qu'il s'agissait de la tête d'une petite fille " cette expérience traumatisante allait influencer inconscienment sa création.
Dés l'age de 16 ans, il découvre sa véritable passion le dessin et la photographie, il est fasciné par le bizarre, une de ses premières photographies qu'il réalise pleine d'audace est un rabbin certifiant avoir vu dieu. Remarqué par Edouard Steichen, ce dernier expose ses clichés au musée d'Art moderne de New York. Il suit une formation de sculpteur a laquelle il renonce parce qu'il affirme que ces photographies sont en soi des sculptures mais obtient une licence de Beaux-arts en 1974.
Enrolé dans l'armée, il devient l'assistant d'un médecin légiste et son travail est de photographier les corps sans vie de soldats accidentés. Il reste dans l'armée pendant trois ans et revient à New York pour se consacrer à sa passion et entre à l'université d'Albuquerque en 1976 pour se perfectionner. Il devient Professeur de photographie et s'adonne à sont art, avec un goût pour le morbide qui choque à chacune de ses expositions. Assemblages de morceaux de cadavres, foetus, malformations de naissance, étrangeté sexuelle.......Pourtant à Paris, à New York, les experts reconnaissent le travail artistique de ces clichés en noir et blanc qui ont pour but de saisir toute la beauté et la laideur du monde.
Sa technique de création
Toutes ces photographies sont préparées en amont par des croquis, il y a peu d'improvisation, ces modèles savent très bien ce qu'il font et pourquoi ils sont là. il les projette dans une scène qu'il a inventée car ils savent que son but est de créer l'image la plus forte et la plus vraie d'eux-mêmes.
La prise de vue est instantanée, tout est réalisé en direct. Il ne fait pas de montage, ni de trucage en laboratoire. Il utilise un Rolleiflex 6X6, il ne prends que un ou deux rouleaux de pellicule par séance. Son travail est réalisé dans son petit studio de six mètres carré environ mais opère souvent en extérieur. La plupart de ces images ont été faite au domicile car ses modèles ne peuvent pas tous se déplacer vu leur handicape. Il emploie à chaque composition de nombreux accessoires: haches, flèches, couteaux, crânes, en devenant la créature de ses fantasmes, ses modèles vivent une autre vie.
Ses modèles.
Le choix de ses modèles sont des êtres inhabituels, mais ils ne sont pas si différents de nous, nous sommes tous un peu bizarres, et d'une certaine façon difformes. Il les photographie parce qu'ils représentent ce qu'il y a d'imparfait en lui, physiquement et spirituellement, il ne les exploite pas et à beaucoup de compassion et de tendresse pour eux.
Au début, il les trouvait dans la rue, dans les bars, certains m'ont été indiqué par des amis, j'ai parfois passé des annonces dans les journaux en demandant de m'envoyer leur photo. Une fois le contact établi il leur explique son projet et leur montre des croquis. Il essaye surtout de gagner leur confiance se qui est primordial pour un photographe. Ce sont des handicapés de naissance, ou des accidentés, victimes d'un traumatisme violent. Il établit avec eux une relation franche.
Son oeuvre est un miroir de la vérité. Elle n'est pas décadente, elle est absolument désespérée et métaphysique.
Au premier abord, on a une sensation de répulsion , de dégoût, de morbide, de malaise puis avec un peu de recule on s'habitue à l'horreur et on peut avoir de la tendresse pour ces modèles. Son travail est reconnu dans le monde entier et fait parti des grands photographes visionnaires contemporains.